De Portrait à quatre mains à On n’est pas des steaks hachés

Entretien avec Anne Galland


Gwenaële Rot

Sociologue du travail, je viens de commencer une recherche avec des collègues (dont Émilie Sauguet qui présente une contribution dans ce numéro) sur la sociologie économique du monde cinématographique. Plus que tous les autres arts, le cinéma a une dimension économique et organisationnelle en raison des investissements nécessaires pour mener à bien un projet de film, et de la complexité technique de la réalisation qui s’appuie sur un nombre important de professions dont il faut assurer la coordination. Les fortes incertitudes en termes de financement, de précarité du marché de l’emploi, de débouchés pour les produits, caractérisent l’activité cinématographique. Les situations extrêmes auxquelles les individus doivent répondre pour compenser les risques inhérents à leur travail donnent lieu à des logiques d’action, des stratégies de compensation, d’innovation, de sécurisation ainsi qu’à des tensions qu’il importe d’étudier parce qu’elles renseignent aussi sur ce qui se joue dans d’autres secteurs où ces mécanismes sont présents et structurants mais moins aisément repérables. Par ses modalités de financement (importance de l’autoproduction), ses conditions de réalisation (équipes de tournage restreintes, technique légère, tournage à l’extérieur), ses formes de diffusion, « l’économie » du documentaire semble renvoyer à une figure « limite » de l’économie du cinéma, là où l’incertitude apparaît la plus marquée. Elle mérite à ce titre une attention toute particulière.

L’entretien que j’ai réalisé avec Anne Galland est l’un des premiers de cette recherche sur le travail cinématographique et a un statut particulier en raison de son caractère « exploratoire ». J’avais rencontré une première fois Anne Galland en automne dernier lors de la projection du film On n’est pas des steaks hachés à l’Université d’Aix où elle accompagnait son film avec Alima Arouali, co-réalisatrice. Intéressée par ce documentaire sur des jeunes de McDo qui découvrent et apprennent l’action collective dans un secteur peu familier des mouvements sociaux, j’avais proposé d’en présenter une séquence lors d’une projection-débat sur la condition ouvrière organisée par le Forum des images et l’Université de Nanterre (où j’enseigne la sociologie). Ironie du sort, la date de programmation coïncida au moment même où le mouvement anti-CPE battait son plein. C’est à cette occasion que je repris contact avec Anne Galland et que je lui proposai de réaliser un entretien sur son travail.

À mon grand étonnement, Anne Galland a souhaité filmer l’entretien pour garder une trace par l’image de ce témoignage qui porte aussi sur une longue et complexe trajectoire professionnelle et, plus largement, une trajectoire de vie. L’entretien — je devrais dire les entretiens (nous nous sommes vues deux fois et un troisième entretien reste à faire) — a été particulièrement dense. Sur les cinquante pages retranscrites des sept heures d’interview j’ai dû me résigner, pour les besoins de la revue, à ne retenir qu’une dizaine de pages. Pour ce faire je me suis attelée à un travail de reprise du texte nécessaire pour rassembler certains propos distribués parfois de manière éparse, enlever quelques redondances tout en respectant la spontanéité et le ton de notre échange. Cette reprise s’est faite aussi à quatre mains puisque Anne m’a aidée à apporter des précisions concernant certains passages un peu flous. Le plus délicat a été de sélectionner les extraits susceptibles d’être les plus pertinents au regard de la thématique de ce numéro. Mon choix s’est porté sur un « arrêt sur films », c’est-à-dire sur le récit de la réalisation des deux documentaires tournés à dix ans d’intervalle : Portraits à quatre mains et On n’est pas des steaks hachés. Par le prisme de ces deux films — portant tous les deux sur des situations de travail — dont les conditions de production et de réalisation furent radicalement différentes, Anne Galland évoque un certain nombre de déplacements et d’enjeux concernant sa situation professionnelle mais aussi des évolutions techniques et socio-économiques qui, me semble-t-il, dépassent le cadre spécifique de son expérience singulière.

Tu as commencé dans le cinéma au milieu des années quatre-vingt comme assistante caméra, « pointeuse », principalement sur des films de fiction ; à quel moment et pourquoi as-tu décidé de faire du documentaire ?

L’arrivée dans le cinéma documentaire s’est faite par le biais d’une rencontre avec un ami qui avait fait Louis Lumière et qui avait déjà réalisé un court métrage documentaire. J’ai partagé sa vie un moment, je l’ai accompagné sur son premier long métrage documentaire. Cela a été une histoire de longue haleine qui a duré trois ans et ou pendant ce temps-là, autant l’un que l’autre, on gagnait notre vie comme cadreur intermittent du spectacle, à droite, à gauche, à la télé, surtout en fiction. Nous sommes allés au Pérou. J’ai beaucoup appris en observant comment il s’y prenait surtout qu’il en était à ses débuts, il tâtonnait. Il n’avait pas énormément de budget, on travaillait en toute petite équipe. J’ai fait l’assistante caméra puisqu’il tournait en 16 mm, j’ai aussi fait du son et comme le financement ne permettait pas de payer tout le travail de préparation du montage et comme cela m’intéressait et que je suis technicienne, je me suis retrouvée à synchroniser les rushes… C’est par le biais du cinéma fauché que l’on s’essaye un peu à toutes les techniques ! C’est à ce moment que je découvre aussi l’association Addoc mais à l’époque [au début des années 1990] je ne me considérais pas du tout comme réalisatrice.

Cette rencontre avec le cinéma documentaire s’est faite par petites touches. Outre cette première expérience que je viens d’évoquer, j’avais commencé à tourner en 16 mm un film sur le Cirque Plume, mais qui n’a pas abouti. C’est en réalisant mon premier film documentaire, Portrait à quatre mains, que j’ai vraiment été confrontée à ce parcours d’obstacles qui est le parcours de tout réalisateur. Tant qu’on ne l’a pas fait, on ne se rend pas compte de ce que cela peut représenter. La première fois, on ne peut pas savoir ce qui nous attend et la deuxième fois, il vaut mieux oublier un peu ! Il vaut mieux se rappeler qu’on y est arrivé et que les choses se font une par une. Il ne faut jamais oublier, malgré les obstacles, que le but c’est bien le film.

Portrait à quatre mains a été un parcours très difficile à tous les niveaux. Je pense qu’il a vraiment fallu un certain acharnement, que cela soit vital pour arriver au bout. C’était une période de ma vie où il fallait que je me lance dans quelque chose qui venait de moi. Le film est un portrait de Mario. Je l’avais rencontré en arrivant à Paris à la fac de Vincennes en 1979-80 où il faisait une formation de cinéma. Il venait du Portugal, il s’était réfugié en France. Il avait une formation d’architecte et de maquettiste graphiste. Après Vincennes il avait repris le cours de son parcours professionnel tandis que moi, entre temps, j’avais fait le Céris 1 et j’avais commencé à travailler comme cadreuse. J’avais fini par trouver ma place, mon statut d’intermittente, et puis j’en arrivais à ce stade où j’avais envie de me lancer dans la réalisation documentaire. Mario, lui, était à un moment de sa vie où il était en butte à l’arrivée de nouvelles technologies et je me retrouvais avec une sorte de questionnement commun sur un état des lieux de nos métiers. Où en est-on des modes de vie qu’on s’est choisis ? Va-t-on pouvoir les préserver ou est-on obligé de s’adapter ? Ces questions de fond sous-tendaient mon envie de faire ce film. Mario me semblait emblématique de cela car il avait fait des choix de vie assez radicaux. Lui aussi avait un statut très particulier où il cotisait à la caisse des artistes indépendants. Dans son atelier, il y avait ses outils de travail : la table à dessin lumineuse, les cutters, le tableau sur lequel il pouvait punaiser ses maquettes pour les regarder. Il était tributaire de toute une chaîne de production. Il faisait ses maquettes sur la table à dessin ensuite il allait en photocomposition ; il allait voir les imprimeurs avec lesquels il discutait sur les chartes de couleur. C’était comme cela qu’il travaillait avant que tout bascule. C’était passionnant : il fallait avoir des compétences dans de nombreux domaines et en même temps savoir déléguer et travailler avec d’autres professionnels qui allaient techniquement mettre en œuvre ce qui avait été conçu. Son travail était très manuel : il y avait ce côté très précis, très soigneux. La technique graphiste est aussi une question de mise en page de conception et donc de création…

Et de cadrage je suppose ?

De cadrage beaucoup ! Je me retrouvais exactement dans la pratique de mon métier de cadreuse et de cinéaste. J’ai tourné ce film en 1994 à un moment où les journaux audiovisuels titraient en gros : « la fin de l’artisanat » car on entrait dans une ère informatique. Ces technologies du virtuel ont vraiment tout révolutionné. Mais ce n’était pas encore le numérique en caméra qui aujourd’hui est accepté comme format professionnel. La vidéo, en tout cas, les camescopes vidéo 8 ou Hi 8 n’étaient pas acceptés par la télévision : il fallait être en un pouce et c’était inabordable pour les particuliers… C’est pourtant un film que j’ai souhaité dès le départ tourner sur pellicule, en 16 mm, parce que je voulais filmer cet ami qui continuait à travailler dans son atelier avec ses techniques artisanales, et la caméra était aussi en train de devenir un outil amateur, un outil plus artisanal alors que cela avait été l’outil professionnel.

À cette époque, les monteurs d’un certain âge ont vécu une chose très dure. Ils ne savaient pas se servir des nouvelles machines, et ceux qui savaient se servir de la machine ne connaissaient pas forcément le métier. Chez Mario, on retrouvait exactement cette problématique où, tout d’un coup, il était en concurrence avec des jeunes qui arrivaient sur le marché de l’emploi et qui savaient se servir de l’outil informatique tandis que lui ne savait pas s’en servir même s’il connaissait le métier. Il avait 50 ans, l’âge que j’ai aujourd’hui. Au départ, je pensais faire un film qui allait être le témoignage d’une pratique, le portrait d’un résistant, de quelqu’un qui allait essayer de préserver le mode de vie qu’il s’était choisi. Mais lorsque j’ai commencé à tourner, je me suis trouvée face à quelqu’un qui n’avait déjà plus de boulot et qui se retrouvait au chômage. Il ne savait pas comment il allait payer le loyer de son atelier. Il était même en train de remettre en question son statut d’indépendant. Il en était à se dire « si on me propose un boulot dans une grosse boîte de photocomposition et bien j’accepte parce qu’on va me fournir le matériel et peut être me former ».

As-tu pu filmer ses anciens gestes ?

Oui. Il n’avait pas de travail, mais sa résistance à l’époque c’était d’aller tous les jours à son atelier et de dessiner des jeux de mah-jong sous forme de cartes. Il faisait la mise en page avec sa technique, manuellement. Ce jeu chinois se joue en faisant des mains.

Dans Portrait à quatre main, les mains de mah-jong, ce sont les chapitres du film mais aussi nos quatre mains sur un portrait que nous faisions ensemble. Cela renvoie aussi au côté manuel de nos métiers.

Comment est-ce que cela s’est passé pour la production ?

Il faut se rappeler qu’au milieu des années 1990, il y a non seulement les nouvelles technologies, mais aussi les chaînes de TV parallèles, associatives, ou locales, et donc les boîtes de production qui vont avec. Il y a eu une prolifération de petites structures qui permettaient de faire des films pour les chaînes câblées reconnues par le CSA, ce qui débloquait l’argent du CNC, des sommes qui étaient de l’ordre de 100 000 francs à une époque où c’était sans doute un dixième de ce que coûtait un film de cinquante-deux minutes, si on voulait payer des salaires à toute l’équipe de techniciens qui étaient censés travailler sur un film. Le problème c’est que les petites boîtes de production ne trouvaient pas toujours d’argent ailleurs et acceptaient de recevoir des réalisateurs qui eux étaient prêts à faire le film avec uniquement cet argent. Concrètement, ils acceptaient de n’avoir que 2 x 5 jours de tournage réellement payé et pris en compte. S’il y avait une équipe, elle n’était pas plus de trois personnes c’est-à-dire le réalisateur, un chef-opérateur à l’image et un ingénieur du son pendant 10 jours et puis ensuite, pendant 4 semaines environ, un monteur. Le réalisateur avait un forfait qui lui permettait de faire les 507 heures et de toucher les Assedic. Avec cela, il pouvait recommencer à travailler sur un projet de film pour lequel, pendant six mois, il lui était possible d’écrire, de faire les repérages, de rencontrer les gens et même parfois de commencer à tourner… C’était donc principalement les Assedic qui prenaient en charge la partie du travail non payé. Et c’est cela qui est remis en cause avec la réforme du statut d’intermittent. De plus, aujourd’hui, le Cosip (l’aide du CNC) n’est plus donné automatiquement à un producteur pour un projet de film s’il n’a pas un diffuseur qui amène en cash au moins 6000 euros. Or, les chaînes câblées n’ont pas d’argent à avancer.

À l’époque de Portrait à quatre mains, on se trouvait devant une plus grande possibilité d’autonomie et donc de démocratisation de la production. D’une part, grâce aux Assedic, mais aussi parce qu’on était dans un contexte où les outils de tournage, de montage, les structures pour faire les films devenaient accessibles. Cela ouvrait une opportunité de faire des films qui ensuite étaient proposés dans des festivals, et qui commençaient à circuler dans ce qui se mettait en place dans les milieux alternatifs. Ils pouvaient être proposés ensuite à la vente aux chaînes qui quelquefois les achetaient tous faits — ce qui leur coûtait bien moins cher que d’être en coproduction en amont. Tout cela se mettait en place en même temps. Ensuite l’équilibre est toujours difficile à trouver. Je n’étais donc pas la seule à me lancer dans la réalisation.

Je savais que cela allait être l’unique documentaire que j’allais tourner sur pellicule. Il fallait que ce soit de ma part très volontaire, ce n’était pas évident pour le producteur. À La Lanterne, ils voulaient bien me produire mais à condition de tourner en vidéo, surtout qu’ils étaient équipés en matériel. Pour eux, c’était absolument impossible de trouver le financement pour le tournage en 16 mm. Mais j’ai tenu bon, je voulais être sur la même longueur d’onde que le personnage de mon film.

Il est vrai que cela coûtait très cher de tourner en 16 mm. Une bobine de cent-vingt mètres de pellicule vierge, qui équivalait à dix minutes de rushes, cela coûtait environ mille francs. Une fois la pellicule négative impressionnée, il fallait la porter au labo pour la faire développer. On faisait défiler la pellicule dans le noir à une température donnée dans des produits chimiques pour révéler l’image et le développement c’était tant de francs le mètre. Ensuite il fallait encore arriver à un positif qu’on payait au mètre aussi. Toutes ces étapes additionnées, cela faisait de sacrées factures ! Quand tu tournais vraiment tu ne perdais pas ta pellicule ! Le clap tu le démarrais au son parce que le son n’était pas sur l’image. Il fallait faire un clap au début ou à la fin du plan de manière à synchroniser sur la table de montage. Pour ce qui est du son, on avait cette bande magnétique dont il fallait aussi faire une copie en format 16 mm pour qu’ensuite sur la table de montage on puisse avoir la bobine image et la bobine son à la même taille avec les perforations. Tout cela demandait beaucoup de temps de manipulation. Il fallait aller dans des labos équipés pour faire le développement des copies ou le transfert.

Les productions de La Lanterne avaient un créneau avec une chaîne câblée et donc, à défaut de me produire en 16 mm, ils m’avaient proposé d’investir l’argent du CNC uniquement sur la post-production de mon film. Mais il fallait que je finance le tournage et le montage. J’ai donc acheté la pellicule négative, et j’ai payé la copie de travail pour le montage. C’est l’ami avec qui j’avais bossé sur son film qui a fait l’image, lui aussi était cadreur chef opérateur, et donc je me suis consacrée à la réalisation. On a eu une dizaine de jours de tournage en tout, étalés sur 4 mois, et seulement 5 heures et demi de rushes, vu le prix du 16 mm on économisait la pellicule ! Ensuite j’ai récupéré une table de montage 16 mm chez le producteur, qui lui s’équipait pour du montage virtuel, et je l’ai installée chez moi. Autant pour le tournage, j’ai pu être aidée par cet ami et par une copine qui a accepté de faire le son bénévolement, autant pour le montage, je ne pouvais pas mobiliser quelqu’un pendant des mois sans le payer. Je me suis donc mise au montage, chez moi, et ça m’a pris un temps fou. Même si j’avais des amies monteuses qui passaient me voir de temps en temps et à qui je pouvais demander conseil, j’étais très seule…

Malheureusement pour ce film, je suis arrivée au moment où il y a eu une mise en garde de la part du CSA ou du CNC. L’enjeu était d’éviter que les films se fassent uniquement avec l’argent public… Et La Lanterne qui devait intervenir au niveau de la post-production s’est fait taper sur les doigts. On leur a dit : « C’est fini, vous ne pouvez plus faire autant de films, il va y avoir un contrôle, il faut qu’il y ait un apport de la chaîne, il faut qu’il y ait des dossiers, il faut qu’il y ait une sélection, il faut que la chaîne lise les projets avant » alors que entre les programmateurs sur les chaînes et les producteurs, c’était tacite. Je n’ai donc finalement pas eu d’aide financière, non plus, pour la post-production !

J’ai été confrontée à un autre problème. Le laboratoire de Bry-sur-Marne qui traitait des téléfilms tournés en super 16 mm par la SFP, a fermé alors qu’ils avaient mon film. Ils avaient fait tout le développement de la copie de travail et j’avais réussi à avoir le montage négatif en heures creuses ce qui me coûtait moins cher, mais ils travaillaient quand ils n’avaient rien d’autre à faire. Le personnel a été licencié ou redispatché dans d’autres labos. Heureusement, ils ont finalement transféré leur service de montage négatif et ils ont continué à travailler sur mon film, mais ça a pris du temps et j’ai eu peur qu’ils perdent mes rushes…

J’ai compliqué les choses en voulant faire ce film en 16 mm. Il m’a coûté à peu près 50 000 francs, rien qu’en pellicule et en labo, et cela m’a pris 4 ans entre le tournage en 1994 et la sortie de la copie Zéro en décembre 1998. Je l’ai tourné en 1994 et je l’ai terminé fin 1998. Il faut dire qu’après le tournage, j’avais retrouvé du boulot comme assistante caméra sur un feuilleton TV qui était très bien payé. Cela m’a pris 5 ou 6 mois de travail et cela m’a permis de me renflouer, de payer mes dettes, de me faire des heures et de rentrer à nouveau dans le système. C’était un moment où je ne voulais plus être assistante caméra, mais je l’ai fait une dernière fois pour payer une partie de ce film. Et puis, je me suis attelée à la table de montage et je me suis lancée dans un stage d’écriture de scénario par le biais d’un CIF. Le CIF a représenté une opportunité miraculeuse. Cette formation permanente permettait de me salarier, de générer des heures et de financer un stage payant. Ce stage m’a été très utile parce que faire un montage c’est une forme d’écriture.

Peux-tu me parler plus précisément du montage ?

Je me suis mise assez vite à la manipulation au niveau de la table de montage. Je suis manuelle, je suis minutieuse, je suis technicienne et cela n’a pas été trop compliqué. Mais par contre, au niveau de la structure, c’était autre chose. Comment est-ce que je raconte mon histoire ? Même si je l’avais un peu écrite et un peu tournée, c’était plus la structure globale du film. Un film ce n’est pas une idée. Une idée permet de démarrer, de se dire « je fais cela, je pars dans cette direction, je mets en place de quoi filmer ceci », tandis qu’un film, c’est une émotion, c’est quelque chose qui va être perçu avec l’émotion d’un spectateur et avec toute son histoire personnelle. C’est vrai que pour moi un film c’est plus de l’ordre du rêve. Ce n’est pas très raisonnable, ce n’est pas très scientifique, cela parle à l’imaginaire émotif. Tu peux dire des choses très sensées ou informatives qui ne vont pas passer parce que cela n’est pas le moment de les dire et que l’image est trop « rouge » alors que tu es entrain de dire « bleu » !

Ce stage, pourtant lié à la fiction, m’a fait travailler sur une structure d’écriture et de narration. Comment faire avancer mon histoire ? Il y a des séquences que j’ai montées très différemment de la manière dont je les avais imaginées… Par exemple, celle de l’archivage du travail de Mario. J’avais fait deux jours de tournage sur ce sujet mais en fait cela faisait plus film pédagogique qu’un film documentaire d’auteur. Bien sûr, c’est le réel mais… pour le faire passer à un spectateur, il faut parfois le montrer autrement que dans sa réalité… Même au niveau de la chronologie ou du rythme de parole, j’intervenais au moment du montage. Par exemple, tant que c’était synchrone, un gros plan de Mario en train de parler, on l’écoute, et quand il y a une hésitation on l’accepte jusqu’à un certain moment. Mais dès que j’enlevais le son et que je le mettais en off sur une autre image de main ou d’objet dans son atelier, à ce moment-là les silences passaient beaucoup moins bien, et donc j’étais obligée de couper très concrètement une image, deux images, trois cm pour enlever un « euh », un bruit. On peut le faire aussi au mixage, cela se prépare mais le montage son c’est beaucoup cela. Parfois c’est presque refaire parler quelqu’un avec un autre rythme.

Ce stage d’écriture a été l’occasion de la rencontre avec Alima, avec qui on a co-réalisé ensuite On n’est pas des steaks hachés.

Je connaissais Alima depuis longtemps, car on était dans le même syndicat de techniciens de l’audiovisuel, le SNT- CGT, mais on a surtout fait connaissance pendant ce stage d’écriture de scénario. On a bien sympathisé, on est de la même génération, de la même expérience féministe, et on appartenait aussi à des milieux qui n’étaient pas a priori destinés à nous conduire vers le monde du cinéma. On étaient très conscientes toutes les deux de la chance qu’on avait eue de pouvoir devenir, elle monteuse et moi cadreuse, dans un contexte où l’accès à ces métiers s’ouvrait un peu. On s’était dit qu’on essayerait de faire quelque chose ensemble, et quand Alima a accepté que Ali Akika réalise un film sur son histoire à elle, Enfant d’octobre, elle a proposé que ce soit moi qui en fasse l’image. C’était en 2000. On a tourné en vidéo, avec une grosse caméra numérique dont il a fallu que j’apprenne à me servir pour l’occasion.

Peu de temps après, j’ai été sollicitée par une amie qui avait un grand projet de film documentaire en Afrique sur la question de la lutte contre l’excision. Elle avait tout monté, les dossiers, la production, cela pouvait être un peu payé. Mais je ne voulais pas faire l’image et le son. J’ai proposé à une amie qui faisait du son, et qui était déjà allée en Afrique, de s’embarquer dans cette aventure. On s’est renseignées sur le matériel le plus accessible sachant qu’il y avait un petit budget pour le financer. C’est à ce moment-là que les petites caméras numériques venaient de sortir : cette petite caméra là, [Anne désigne la caméra qui nous filme], la PD150 qui vraiment commençait à devenir le matériel semi professionnel, que la TV acceptait, et qui a quand même deux pistes son, avec une possibilité de percher et de rajouter un micro HF.

Voilà, j’en étais arrivée à une certaine pratique où c’était le moment de m’équiper. Je n’avais pas tout à fait les moyens, 30 000 francs ce n’est quand même pas rien ! Mais j’avais 45 ans, et je décidais d’avoir ma petite caméra numérique, la même que celle dont j’avais appris à me servir en Afrique.

C’est ensuite que tu t’es lancée dans la réalisation de ce film sur les jeunes de McDo, avec Alima Arouali ?

Oui. Pour On n’est pas des steaks hachés, je venais d’avoir cette caméra dont j’avais appris à me servir en Afrique. Les conditions de réalisation de ce film ont été très différentes du précédent. C’est venu à une autre période de ma vie. J’avais déjà arrêté de travailler comme assistante caméra et je m’étais de plus en plus orientée vers le documentaire. J’y travaillais comme cadreuse, chef opératrice image. Je commençais à avoir l’expérience de travailler à l’image de films documentaires, réalisés par d’autres dans une petite équipe.

J’avais aussi un nouveau projet de réalisation pour lequel j’avais réussi à obtenir une résidence d’écriture documentaire à Lussas, mais ce n’était peut-être pas le bon moment pour ce genre de film très personnel qui est resté en jachère… L’époque était à la mobilisation.

Notre statut d’intermittent était déjà menacé, le Medef voulait nous transformer en saisonnier. Jospin, qui était premier ministre, avait toutefois réussi à « pérenniser » notre statut par une loi, tant que cela n’avait pas été négocié, car le Medef ne voulait pas reprendre un vrai tour de table.

Pendant une A G au théâtre de la Colline, des jeunes de chez McDo, du comité de soutien, sont venus nous parler de leur grève. Ils n’ont pas forcément été bien compris au départ. Je reconnais qu’un syndicat d’intermittents où les gens avaient presque tous vingt ans de métier, cela leur était difficile de se mettre au niveau des jeunes qui leur disaient : « on est en grève chez McDo ! ». Ils ne voyaient pas forcément où était la connexion, alors que la connexion est à un niveau plus global, dans la façon dont on travaille aujourd’hui avec la précarisation. Alima qui était à cette AG a tout de suite été intéressée et a senti que l’on pouvait faire quelque chose.

Autant pour Portrait à quatre mains ça a été de l’acharnement, autant là c’était le contraire : cette grève était en train de se passer, les jeunes sont venus en parler aux intermittents, avec Alima, cela nous intéressait, on se sentait solidaire, on avait envie de faire un film ensemble. J’avais le matériel, on y allait, on sympathisait. Ils ont pris notre téléphone et dans la semaine qui a suivi ils nous ont appelé. « Vous nous avez dit que vous aviez une caméra, est-ce que vous pouvez venir tout de suite ? Les jeunes qui faisaient le piquet de grève dans le froid venaient de rentrer dans le McDo. Ils ont profité de ce que leur gérant essayait de faire des travaux, les vigiles ont ouvert les portes et ils se sont engouffrés et comme il faisait très froid ils ont occupé le restaurant… Voulez-vous venir filmer cela ? » On était libre toutes les deux. On est parti. J’avais mon matériel qui était facile à transporter. On habitait pas loin l’une et l’autre de Strasbourg-St-Denis et nous voilà en tournage ce jour-là, et cela s’est enchaîné. Eux-mêmes étaient en train de mettre en place un fonctionnement avec un comité de soutien de plus en plus cohérent. Évidemment cette grève pouvait ne pas durer. C’était un risque à prendre pour ce projet, mais au moins on aurait tourné ce qui est entrain de se jouer là. Et au départ, on a été obligé de tourner sans production parce que si on commençait par écrire et attendre une réponse… C’est le genre de cas de figure où ce n’est pas la peine. Mais cela a pu se faire parce que j’avais une caméra et la possibilité de faire le son, puisque je m’étais équipée en micro et en système HF.

Étiez-vous dans le comité de soutien ?

Par rapport à ces jeunes, on était des intermittents mobilisés de notre côté, et c’était à un moment où beaucoup de gens l’étaient. Il y avait eu les infirmières, les enseignants. C’était une période où cela bougeait beaucoup. On n’y est pas allé pour faire partie du comité de soutien, mais par contre, on était en adéquation avec ce qui se passait et on s’était trouvé notre place. On a été tout de suite très bien accepté avec notre caméra même si ce n’était pas très clair. Ils ne savaient pas très bien qui on était. Simplement, ils voyaient bien qu’on était avec le comité de soutien. Il faut savoir qu’il y avait pas mal de médias, de journalistes et même des télés mais beaucoup plus ponctuellement que nous. Ils avaient besoin que tout ce monde soit autour d’eux, que les politiques viennent les voir.

Ils sentaient que c’était une caméra différente des autres ?

Oui et non. Quand le film est projeté, presque toujours on nous pose la question : « En quoi la caméra ou la réalisation d’un film documentaire change la réalité ? En quoi le fait d’être filmé va-t-il manipuler, orienter ou transformer ce réel que l’on filme ? ». Ils en avaient une perception. Il est évident qu’il y a des scènes (par exemple, quand ils chantent leurs chansons ou quand un des jeunes vient essayer de mettre en grève ceux du McDo des Champs Élysées) où s’il n’y avait pas eu notre caméra, cela aurait été différent. Dans le deuxième exemple, peut être que ce jeune aurait discuté 5 minutes et qu’il aurait fait autre chose. Bien sûr qu’il y a quelque chose de l’ordre de l’émulation. Mais leur lutte et leur histoire, on n’y était pour rien et très clairement, on en était bien conscientes. Certes, de temps en temps, ils nous parlaient à nous ou à notre caméra, mais la plupart du temps, c’était entre eux et c’est cela dont on a rendu compte. L’enjeu était tellement ailleurs que notre caméra était invisible.

Comment cela se passait-t-il ? Les jeunes appelaient ?

Oui. On s’était laissé nos numéros de portables. C’est aussi comme cela qu’ils fonctionnaient entre eux pour s’organiser. Au niveau du comité de soutien, il y avait de toute façon deux rendez-vous précis le samedi matin au restaurant, un départ pour une action, comme occuper les autres restaurants ou simplement manifester, et puis il y avait une AG par semaine à la Bourse du travail. La fédération du commerce CGT avait permis d’accéder à cette salle, rue de Turbigo. Ils ont fait en tout trois mois de grève avant de gagner aux prud’hommes.

On a filmé mi-décembre les premières séquences ensuite on y allait trois, quatre, cinq fois par semaine régulièrement. Mais parallèlement, on s’est dit : « Dans quoi on s’embarque ? Qu’est-ce qu’on va trouver comme production ? ». Heureusement, cela a été l’inverse de Portrait à quatre mains. On a eu des coups de chance, au bon moment. Une chaîne câblée Télévision création citoyenne, qui venait d’être reconnue par le CSA, s’est montrée intéressé ce qui a permis de débloquer le Cosip pour La Cathode, qui est d’ailleurs plus une association qu’une boîte de production. Aujourd’hui, La Cathode va très mal, mais à l’époque elle était en train de se lancer dans la production de films documentaires en plus de ses activités d’ateliers en banlieue, et elle avait le droit d’accéder au fond de soutien du CNC. Depuis, c’est fini. Une association n’a plus le droit au Cosip. Elle avait fait un appel à candidature, et pour notre chance, elle s’intéressait beaucoup à ce type de sujet, des films documentaires en forme d’état des lieux, et elle a retenu notre dossier.

Pour ce film-là, on a donc pu avoir une production qui a obtenu le fonds de soutien du CNC. Par contre, c’était une association qui elle-même avait des frais, et notamment 5 emplois jeunes à faire tourner. De notre côté, on avait une petite souplesse avec ce fameux statut d’intermittent. J’avais ce créneau de travail comme cadreuse à France 3 qui me donnait des heures, mais Alima, en tant que monteuse avait décroché, il lui fallait des heures. Nous avons donc décidé de la jouer très communistes (rires), « à chacun selon ses besoins » et l’argent qui est arrivé lui a été donné selon ces priorités ce qui lui a permis d’être payée, déclarée et d’obtenir ses 507 heures.. On a travaillé presque un an, on a co-réalisé, écrit. On a passé quatre mois en tournage et trois mois en montage.

On a terminé le film sur McDo en août 2002, entre temps, il y avait eu les présidentielles et Le Pen au premier tour, et la réforme sur les intermittents a été votée en juin 2003. ..

Après, il y a eu un autre film sur McDo, Tempête dans un McDo…

Peu après, ils ont eu un nouveau gérant et ils ont repris une grève qui a duré un an. Et il y a eu effectivement un autre film… Maintenant, il y a même trois films sur cette histoire. Nous, on a fait un film avec Alima en tant que professionnelles. Il y avait Joseph, qui lui était dans le comité de soutien, qui a filmé énormément de choses, surtout au moment de la deuxième grève. Il a tourné tout seul, sans avoir d’expérience. Il s’est lancé dans un montage et il a un film de trois heures… c’est très intéressant, mais c’est vrai qu’il faut prendre le temps de le regarder. Il a capté quelque chose et il y a un vrai film à faire à partir de cela. C’est très important d’avoir cette matière. Et puis, il y a eu pendant la deuxième grève deux filles comme nous [Nathalie Boisson et Rossalinda Scalzone] dont une était en formation, elles étaient beaucoup plus jeunes que nous. Elles se sont lancées aussi dans quelque chose qui était peut-être plus militant que nous encore. Il est arrivé que ces deux films soient projetés l’un après l’autre. Alors que nous avons construit un film avec une action, avec une structure, elles ont fait des interviews. Elles ont profité de ce temps de grève, qui a duré un an, où les jeunes — les mêmes — occupaient le restaurant. C’était long et c’était pendant ce temps où il y avait toutes ces mobilisations, les retraites, la guerre en Irak etc. Pendant cette seconde grève, il y a eu une vraie connexion avec la coordination des intermittents et les précaires. Je pense qu’il y avait plus cette notion de solidarité face à la même précarité.

Les deux autres réalisatrices étaient dans le comité de soutien des McDo. Nathalie était militante, elle était là dès le début, on l’avait même filmée. Elle n’était pas du tout dans l’audiovisuel, mais Rosa, elle, avait fait une formation, c’était sa pratique, son outil, elle avait mené la réalisation. Leur idée de départ était de collecter la parole. Nous, ce qu’on avait filmé, c’était l’évolution, l’expérience en temps réel de ces jeunes qui prennent confiance en eux, qui apprennent leurs droits, qui apprennent à s’exprimer. Pendant la deuxième grève, elles leur ont demandé de raconter la première grève et lorsqu’on voit les deux films, l’un après l’autre, on retrouve les mêmes gens qui, tout d’un coup, ont une parole. Mais ce n’est pas un film sur la deuxième grève, c’est un film sur la manière dont les jeunes ont vécu la première grève et sur ce qu’ils peuvent en dire après coup. C’est passionnant.

Comment cela s’est passé pour la diffusion ?

La première projection de On n’est pas des steaks hachés s’est faite à Bobigny au Magic cinéma. La Cathode, notre producteur est à Bobigny, et il y avait beaucoup de ces jeunes qui étaient du 93 car la directrice de la salle organisait, pour la deuxième année un festival sur les luttes sociales : Résonance… Elle avait programmé notre film avant même qu’il soit terminé probablement parce que quelqu’un de La Cathode lui en avait parlé ou quelqu’un de notre syndicat d’intermittents, qui la connaissait. Il y a des réseaux relativement logiques de gens qui sont dans les mêmes activités.

Les modes de diffusion c’est très complique. Cela bouge aussi encore une fois parce que qu’il y a de nouvelles possibilités avec les vidéoprojecteurs, avec les DVD, on dispose de moyens qui maintenant apportent un certain niveau de qualité de diffusion, de la facilité… Les salles de cinéma commencent à s’équiper et tout cela se met en route ensemble. Il y a une reconnaissance d’intérêt pour le cinéma documentaire, encore que ce soit très ciblé. Ceci dit, les films qui drainent un public à cause de leur sujet ont toujours existé. En documentaire, le public va d’abord voir le sujet « qui fait déplacer ». Ensuite le bouche à oreille joue. Être et avoir, c’était quand même aussi le sujet de cette classe unique au centre de la France qui existe encore à une époque où tout a complètement changé… cet instituteur… Le film est sorti au moment d’une rentrée scolaire, au moment où des enseignants étaient mobilisés. C’était cela qui a accroché. On ne parlait plus de documentaire, on disait : « Le film sur la classe ». II y a aussi une habitude et un apprentissage de la part du public. C’est un cercle vicieux : s’il n’y a pas de public, les salles ne prennent pas les films documentaires, et pour le moment, ce que l’on observe, c’est qu’elles font des entrées lorsque le réalisateur accompagne son film. Les salles ont vraiment envie de retrouver quelque chose qui s’est beaucoup fait à une époque, le ciné-club. Ce que les spectateurs viennent chercher ce n’est plus simplement le film. Quand on nous invite à débattre, on a très envie de parler de cinéma et lorsque l’on parle de cinéma c’est fantastique ; mais parfois, ce ne sont pas les réalisateurs qui sont invités, mais des personnes que l’on sollicite pour parler du sujet du film. Par exemple, le film de Mika Gianotti sur la conciliation de justice, Dans le sillon du juge sans robe, dont j’ai fait l’image, c’était le cas. Certaines salles voulaient la présence de conciliateurs, de magistrats.

Quand on est invité à la projection de notre film, la plupart du temps les gens commencent par nous demander ce que les jeunes grévistes sont devenus. On raconte la deuxième grève, et je suis contente quand des questions nous permettent de parler de cinéma, par exemple, « Pourquoi n’avez-vous pas filmé le gérant ? » Nous expliquons que ce n’est pas parce que nous n’avons pas pu, mais parce qu’on a fait le choix de ne pas aller voir de ce côté-là. On n’est pas journaliste. Notre but n’était pas de faire un reportage sur ce qu’il en est du travail chez McDo… Nous ce qui nous a intéressé, c’est que ces jeunes des banlieues se mettaient en grève contre ce géant de la restauration rapide, et c’est ce film là qu’on a fait.

Et en même temps, c’est vrai qu’accompagner les films, cela prend du temps, c’est un vrai travail qui n’est presque jamais rémunéré. En ce moment, on doit être sur tous les terrains pour faire un film ce qui implique d’être mobilisé 24 h sur 24h, mais il faut être aussi mobilisé sur les questions du statut, la réforme du CNC, l’évolution des technologies, le droit d’auteur par rapport à la diffusion sur internet etc. Lors de Portrait à quatre mains j’avais quarante ans, là, j’en ai cinquante et je me retrouve de nouveau à une période critique où il y a des choix à faire, des choses à abandonner, où il faut évoluer, il faut aller vers autre chose. Ce sont des questions très personnelles. J’ai l’impression d’avoir vraiment vécu vingt ans de transformations radicales sur tous les plans.

Entretien réalisé le 27 avril, 2006


  1. Centre d’étude et de recherche de l’image et du son.


Publiée dans La Revue Documentaires n°20 – Sans exception… culturelle (page 116, 3e trimestre 2006)