Fire and Forget de Holger Trülzsch

Marie-Christine Peyrière

Quelle résistance l’artiste oppose à l’esthétique de la technologie électronique, à son indifférence à la tuerie, à son anesthésie sur la souffrance, à son spectacle sur la machine ?

Sa position demeure modeste, selon le plasticien Holger Trülzsch, ses stratégies limitées. Il lui reste le démontage du cadre de la vision et le réveil des sensibilités.

Dans l’ancienne salle de cinéma du Credac, à Ivry, les photos de presse défilent par flashs sur les petits mouchoirs inutiles trempés dans la suie. Le spectateur ne voit rien, qu’une lumière aveuglante interrompue par un son strident. Le paysage de ruines devient une image vidéo, fragmentée par les accords de Jimi Hendrix. Aux notes tourmentées répond la peau brûlée en caoutchouc d’un monde calciné.

La méthode esthétique résiste à la consommation, le parcours oblige au détour, la violence de l’éclair ferme les yeux. Le visuel de la destruction se défait sous le tragique imperceptible de la réalité.


Publiée dans La Revue Documentaires n°8 – Engagement et écriture (page 195, 1er trimestre 1994)