Sur « Air/Vâyu » de Viswanadhan
Marie-Christine Peyrière
L’éveil au monde. Cet instant d’ouverture au réel, le peintre le frôle par le geste plastique.
Mais qu’est-ce qui est le plus réel ? Ce qui est écarté de la vue, ce qui est accessible ?
Le regard a une autre histoire en Inde et son karma imprègne le peintre cinéaste Viswanadhan dans Air/Vâyu, son quatrième volet de la série Éléments.
L’air. Histoire de l’air. L’image naît de cette transparence.
Des yeux regardent. Une fois. Le cinéma cadre l’élémentaire d’une cérémonie tantrique filmée avec une Bolex. Et ainsi de suite.
Les jaunes des fleurs, chants cérémoniels, frontière, fantômes noirs, fantômes blancs, appel des cailloux sur le temple, sable, désert, respiration profonde, et la ville asphyxiée, les ballons, les contretemps, les fourmillements, les bruissements, les échos des noms de pays.
Les regards intenses ouvrent leur cœur dans l’ascension vers l’absolu, vers l’Un.
Au bout du trajet dans l’indianité, dans l’interstice de la matière, au bout des limites du corps, à la vie, à la mort, car tout corps est irrémédiablement deux, dans un souffle, arrive la danse de l’émotion de Chandralekha.
« Le poétique est donc, vous le voyez, une expérience du monde » 1.
- Yves Bonnefoy, Le Monde du 7 juin 1994.
-
Air/Vâyu
1994 | France | 59’ | 16 mm Réalisation : Velu Viswanadhan
Publiée dans La Revue Documentaires n°10 – Poésie / Spectacles de guerre (page 33, 1er trimestre 1995)