Vidéo Éclatée

Vincent Goulet

Une vision subjective – parce qu’on ne sait pas tout – sur l’état du documentaire indépendant en Midi-Pyrénées:

Le documentaire en Midi-Pyrénées se porte mal

Les producteurs

Les boîtes de production avec un capital conséquent travaillent presque exclusivement dans le film d’entreprise ou institutionnel. Le premier producteur de documentaire dans notre région est une école, l’ESAV (École Supérieure d’Audiovisuel). Cette école publique d’environ cent-vingt étudiants est située – pour le moment – dans la faculté de lettres de Toulouse). Plusieurs de ses étudiants s’intéressent de près au documentaire. Beaucoup de leurs films dépassent largement la médiocrité scolaire, par le choix de sujets variés et urgents, en développant un langage propre et (im)pertinent.

Plusieurs associations (La Trame, AAAA, Dolce Vita…), dont les membres sont parfois, mais pas uniquement, des anciens de l’ESAV, tentent avec peu de moyens de produire des documentaires. Leur importance va grandissante et leur travail est de qualité dans un contexte très défavorable.

À noter également l’existence à Blagnac, près de Toulouse, du CERRAVHIS qui produit, réalise et diffuse des films sur la période de la Résistance.

Les aides des institutions

Elles sont très minimes (environ 8 million de francs en 1991, région et DRAC confondues pour l’ensemble de l’audiovisuel, rien au niveau départemental pour la Haute-Garonne, au compte-goutte au niveau municipal). Elles sont de plus très difficilement accessibles, surtout pour les structures légères. Le documentaire n’en profite pas. Il faudrait que cela change.

À noter toutefois l’appui que peut offrir les CUMAV (location de matériel à faible prix) de Castres (81) et Cahors (46). Il n’est pas négligeable et souvent sollicité.

Profitons-en pour déplorer la timidité de la politique régionale de la délégation de l’INA. Situé à Toulouse-Labège, l’Institut dispose de matériel – d’ailleurs en partie financé par la Région – peu ou mal utilisé. Il serait utile que l’INA offre enfin un soutien actif aux petites structures de la région.

La diffusion

Télé-Toulouse (TLT) est une « Télé-monsieur-le-maire » prétentieuse et médiocre à vocation pseudo-commerciale. Elle a diffusé quelques films de l’ESAV, dont beaucoup de documentaires. Je n’ai pas compris quel intérêt cette école pouvait avoir à passer – sans contrepartie et quand elles n’étaient pas censurées – ses productions sur cette antenne.

Il existe à Toulouse et ses environs un excellent festival, « Les Rencontres Cinéma d’Amérique Latine », qui programme fictions et documentaires (en mars).

Une autre initiative, « Les Écrans de l’Histoire », vient d’avoir lieu avec pour cette première édition des films et des colloques sur la découverte de l’Amérique.

Enfin, depuis juin 1992, une association, Vidéo Éclatée, se lance dans la diffusion de la vidéo, surtout des documentaires, lors de soirées de projection à Toulouse. L’association a la volonté de créer un réseau en Midi-Pyrénées et de s’occuper de la distribution.

Il est nécessaire qu’il se porte mieux

Parce qu’il faut combler le gouffre qui s’accroît chaque jour entre les citoyens et le spectacle télévisuel. Il faut donner un autre statut à l’image et au son que celui de mirages inaccessibles. La production de films, de documents qui parlent – autrement qu’avec la langue de bois du reportage – de réalités proches des gens qui habitent notre région est la première étape vers une autre relation du spectateur avec la représentation audiovisuelle.

À cette « production de proximité » doit correspondre une « diffusion de proximité ». Ce problème est peut-être encore plus difficile à résoudre, les réseaux de diffusion du documentaire étant quasi inexistants. À notre avis – je parle ici au nom de Vidéo éclatée – le premier effort à fournir en faveur du documentaire indépendant est le recensement des films et la diffusion.

Loin de nous, l’idée de rester dans une vision étroitement régionaliste. Parallèlement à la production et la diffusion de proximité, il nous semble possible de développer l’achat ou l’échange de programmes entre diffuseurs régionaux, et là je pense particulièrement aux télévisions locales.

La filière « province – Paris – France » étant plutôt encombrée par les désinformateurs, autant établir des contacts transversaux – ce qui demande d’ailleurs beaucoup d’énergie. En serons-nous capables ?

Enfin, toujours utile à rappeler, les réalisateurs et diffuseurs de région n’ont pas à se spécialiser dans la seule représentation de leur région. Il est précieux qu’un Lorrain puisse tourner un film en Pologne, de même que des Toulousains s’emploient à montrer des documentaires latino-américains.

Pour Vidéo Éclatée, Vincent Goulet


  • Vidéo Éclatée souhaite vivement échanger réflexions et expériences sur ces problèmes ainsi que collaborer à leur résolution.

Publiée dans (page 130, )