Ça a commencé comme ça…

Claudie Jouandon

« L’argent, c’est la vie ; l’argent, c’est la satisfaction des besoins et des désirs. », Honoré de Balzac, Les Ressources de Quinola, III, 2 – 1842

On a l’habitude d’entendre dire que « l’argent est le nerf de la guerre », mais avant tout, n’est-il pas plutôt « le nerf de la vie » et peut-être même, sa condition sine qua non ? C’est ce que Frédéric Lordon exprime ainsi : « Privés de pourvoir par eux-mêmes à leur reproduction biologique et matérielle, les individus sont donc obligés d’en passer par l’argent » 1. En effet, les endroits du monde où les besoins élémentaires de survie (se nourrir, se vêtir, se loger…) sont accessibles sans devoir « en passer par l’argent » deviennent de plus en plus rares… Il est donc pour le moment, dans nos sociétés en tous les cas, une nécessité impérieuse d’existence. De ce fait, cet élément central et primordial accompagne au quotidien la plupart de nos gestes et de nos actions… Une évidence encore plus sensible en période de crise !… L’enchaînement inexorable de ces « échanges contre de l’argent » est mis en scène par Jorge Furtado dans son film, L’Île aux fleurs (1989), à travers le circuit d’une tomate 2, ce qui n’est pas sans rappeler le film d’Yves Allegret sur les pommes de terre, intitulé Prix et profits (1932) 3.

Les inégalités dénoncées dans ces deux films n’ont cessé de croître avec la déréglementation des marchés financiers mondiaux, suite à l’effondrement du bloc de l’Est. Elles sont désormais plus visibles encore depuis la crise de 2007. Dans un rapport de l’OCDE paru en juillet 2013, « Toujours plus d’inégalités, pourquoi les écarts se creusent », on constate que cet écart entre riches et pauvres s’est amplifié dans la majorité des pays de l’OCDE, à partir des années 1980, et qu’ il atteint un niveau record en 2007 4.

Même si la crise a mis plus clairement en évidence les dysfonctionnements du système, elle fait partie, au regard de l’histoire du capitalisme, du déroulement normal de ce système. Elle est même indispensable pour redonner de l’élan au capital, à ceci près, comme le faisait remarquer J.A. Schumpeter, que : « Le nouveau ne sort pas de l’ancien, mais apparaît à côté de l’ancien, lui fait concurrence jusqu’à le ruiner » 5. Cette guerre sans merci est au centre de l’intrigue du film, Les Grandes Familles, de Denys de La Patellière (1958) d’après le roman de Maurice Druon (1948) 6. Elle apparaît aussi de façon très originale dans le film de Gérard Mordillat, Le Grand Retournement (2013), une reprise de la pièce de Frédéric Lordon, D’un retournement l’autre (2011) 7.

Les conséquences de cette mondialisation ont souvent été dénoncées par des documentaires qui traitent d’économie, mais la difficulté reste celle de « la mise en forme » d’images, capable de rendre compte du système-même de la financiarisation, lorsque l’argent produit de l’argent et circule à la vitesse de l’éclair. En cela, le documentaire de Denis Robert, L’Affaire Clearstream, racontée à un ouvrier de chez Daewoo (2002) 8, a innové dans la mesure où il a essayé de reconstruire le circuit qui relie la fermeture d’une usine et sa délocalisation aux chambres de compensation pour les transactions boursières 9.

En effet, il est curieux de constater que « l’argent », cet élément à la fois tellement précieux et banal, reste si mystérieux pour peu qu’on s’interroge sérieusement sur sa création, sa valeur et sa circulation. On oublie souvent que la monnaie n’a pas de valeur en soi, et qu’elle est fondée sur une croyance collective. Il suffit pourtant d’en changer (francs contre euros) pour s’en rendre compte. C’est sans doute pour bien l’ancrer dans la tête de ses utilisateurs, que des pièces maltaises portaient cette inscription : « Ceci n’est pas du métal, c’est un gage de foi » (sens étymologique de fiduciaire), rappelant que la monnaie « n’obtient sa valeur qu’à travers l’investissement collectif que nous lui donnons tous […] et c’est cela qui la rend excessivement active… » 10 Mais approfondir cette question rationnellement est souvent perçu comme une difficile plongée dans le jargon économico-financier, bourré d’abstractions mathématiques — ce qui a d’ailleurs donné l’illusion d’avoir à faire à une science exacte !

Par ailleurs, comme le souligne Frédéric Lordon « L’argent est difficile à manier, aussi bien conceptuellement que pratiquement, parce qu’il est un concentré de désirs et de violences extraordinaires […] qu’il n’est pas autre chose que la projection extériorisée de nos propres désirs… » 11. Ainsi, sans toujours bien nous en rendre compte, nous nous sommes forgés de solides représentations qui nous servent à élaborer notre façon de voir et de comprendre ce phénomène socio-psychologique qui à l’évidence, nous constitue fondamentalement, et constitue la plus grande part de notre environnement matériel et intellectuel, mais aussi relationnel, émotionnel et artistique.

Et c’est de cette agitation, passion et action autour de l’argent que Zola a voulu rendre compte « quasi scientifiquement », dans son roman intitulé, L’Argent (1891). Marcel L’Herbier, qui en a fait la transposition cinématographique, sous le même titre (1928), s’est également attaché à mettre en scène, très précisément, l’emprise que ce désir d’argent a sur le moindre geste, comportement et regard 12.

Concurrents et supports de notre imaginaire, la littérature et le cinéma alimentent en images les effets — positifs ou négatifs, réels ou fantasmés, psychologiques ou sociologiques — des désirs, quêtes, conquêtes, utilisations et jouissances de l’argent. Toutefois, ces apports sont-ils suffisamment éclairants pour nous permettre de cerner, voire maîtriser, les aspects essentiels de ce système monétaire institutionnel afin de trouver des solutions plus adéquates !… Le documentaire qui agit depuis longtemps sur le terrain, et qui est souvent considéré comme un écho plus vif et net de la réalité, a-t-il ou peut-il jouer un rôle spécifique de médiateur, riche en propositions, et déclencheur d’initiatives nouvelles ? Peut-il faire preuve d’une efficacité et d’une créativité suffisante pour faire émerger des représentations nouvelles sur le partage du monde, et donc aider à lutter contre les tractations criminelles de l’argent ?

Je possède donc je suis

Dans l’histoire de nos représentations, du moins occidentales, notre premier contact avec l’argent pourrait bien être le regard sur le « porte-monnaie de la mère », tel que Claude Pazienza le montre dans son film, L’Argent raconté aux enfants et aux parents (2012) 13 : cet objet palpé, ouvert et refermé, avec tant d’attention, quasi religieusement, qui trône en fétiche idolâtré, au centre des préoccupations familiales. Cette image attendrissante renvoie chaque spectateur à ses propres souvenirs… et peut-être, à ce moment capital où l’importance de cet objet est apparue essentielle parce qu’il barrait la route à nos désirs, nos volontés de faire, d’être et d’avoir ?

Ainsi tout l’environnement de notre quotidien s’engouffre dans cette petite poche, comme le génie salvateur de la lampe d’Aladin. Désormais, avec les entrées et sorties de notre porte-monnaie, défile notre ligne du temps qui mène irrémédiablement de « j’avais » à « j’aurai » en passant par « j’ai » ! De ce fait, en manipulant ces pièces et billets, on fait non seulement l’apprentissage d’un outil rendu indispensable à l’insertion sociale, mais, à travers ces valeurs d’échanges, on se fabrique aussi, malgré soi, une identité où se confondent pouvoir d’achat et pouvoir d’être, sachant que « ces désirs et ces passions viennent de cette plongée dans le monde social » 14.

« Creusez, fouillez, bêchez ; ne laissez nulle place où la main ne passe et repasse. », La Fontaine, Le Laboureur et ses enfants

Le film de Jorge Furtado, L’Île aux fleurs, datant pourtant de 1989, est aujourd’hui encore une démonstration exemplaire de cette absolue nécessité d’être bien placé dans la chaîne des échanges au risque d’être « servi après les porcs de l’Île aux fleurs » ! Ce documentaire court (12 minutes), sous une forme unique et particulièrement originale, pose des questions fondamentales sur notre organisation sociale en suivant le parcours d’une tomate, depuis sa plantation jusqu’à son aboutissement dans une décharge.

Après une présentation surprenante et ludique, le film nous fait entrer au cœur du sujet par cette phrase, dite en voix off : « M. Suzuki est Japonais et donc un être humain. Cependant, M. Suzuki ne plante pas des tomates dans l’intention de les manger. Presque toutes les tomates produites par M. Suzuki sont livrées à un supermarché en échange d’argent ». Placés au point de départ d’une longue chaîne de production, distribution, consommation, nous essayons d’en suivre la progression, malgré de nombreuses digressions le plus souvent incongrues, toutefois justifiées par une logique interne qui reste à découvrir. Le montage en patchwork d’images d’origines diverses — illustrations, archives et documentaires — accentue cette impression d’être au milieu d’un jeu de piste ou devant la reconstitution d’un puzzle !

Toutefois, par la répétition de certaines phrases et images, se constitue une armature centrale : « La tomate, plantée par M. Suzuki, échangée contre de l’argent avec le supermarché, échangée contre l’argent que Mme Anette a échangé contre les parfums… » Cette chaîne d’échanges d’argent, semble être, par une sorte d’évidence, le noyau le plus solide et le moins exotique de cet imbroglio démonstratif… Quand soudain la conclusion explose… : les images d’un troupeau de porcs sur la décharge de l’Île aux fleurs cèdent la place à celles d’une petite troupe de femmes et d’enfants qui… « creusent, fouillent, bêchent, ne laissent nulle place où la main ne passe et repasse… » et la voix off d’expliquer sans effet dramatique, mais comme une conclusion logique : « Ce qui a été considéré inadéquat à l’alimentation des porcs sera utilisé pour l’alimentation de femmes et d’enfants. Les femmes et les enfants sont des êtres humains avec le télé-encéphale hautement développé, le pouce préhenseur, et sans argent. Ceux-ci n’ont pas de propriétaire… »

C’est alors que s’opère un retournement brutal, et que ce qui ne posait pas question, devient l’interrogation centrale : est-ce cette succession « normale » et « logique » d’échanges d’argent qui conduit à ce désastre ? Qu’est-ce qui nous maintien ou non dans cette chaîne d’échanges ? On comprend alors pourquoi tous les autres raisonnements autour semblent déraper et sombrer dans l’absurde ou l’inutilité, symboles d’une impuissance à enrayer cette logique « impassible » qui conduit de la plantation à la décharge. Sachant qu’il y a déjà eu pire dans le passé (allusion à l’esclavage, images de l’explosion d’une bombe atomique et de camps de concentration), peut-on se sentir rassuré par les dommages collatéraux inévitables de notre société moderne ? C’est comme si, malgré les développements économiques et technologiques, devait subsister une misère résiduelle incompressible. La dénonciation est d’autant plus efficace qu’elle s’énonce comme une fatalité implacable. Ainsi mise en scène, cette démonstration fissure nos certitudes et interroge notre façon de vivre en société. L’impact des images finales, accompagnées de sons de guitare discordants nous interpelle sous la forme d’un cri d’alerte : l’urgence d’accorder nos instruments pour harmoniser l’ensemble… ce qui déclenche en nous l’impérieuse nécessité de trouver les questions justes qui nous mettent sur la bonne piste afin de rassembler toutes les pièces du puzzle, utiles à la reconstitution d’une logique d’enchaînements plus judicieuse, plus efficace… et réellement humaine !

Dans le film d’Yves Allegret, Prix et profits, nous remontons encore dans le temps puisque nous sommes en 1931, proches d’une autre « crise »… Le décor campagnard, d’une beauté picturale, contraste avec le dur labeur du ramassage des pommes de terre qu’effectue une famille de paysans. Ensuite, triées par taille, mises en sac et chargées sur une charrette, les pommes de terre s’apprêtent à partir pour la ville devant la mine réjouie des enfants qui agitent leurs mains en signe d’au revoir, contents d’avoir accompli leur tâche et sûrs d’obtenir la récompense espérée. Or maintenant, il s’agit de vendre les pommes de terre, mais l’acheteur montre que son stock est déjà bien rempli, et que cela va donc avoir des conséquences sur le prix… Cette incertitude sur le coût du travail peut-elle mettre en péril l’équilibre vital de cette famille ? Et la même question se pose aussi, à l’autre bout de la chaîne, pour l’ouvrier-consommateur… Ce court métrage, muet, en noir et blanc, donne une réponse sans appel : même en travaillant dur et beaucoup, on peut devenir pauvre… cela dépend du prix et du profit du moment ! Et le film de suggérer par des images fortes, l’union des ouvriers et des paysans pour défendre un revenu décent !…

Mais derrière ce tableau, il est aussi question d’autre chose qui n’est pas visible : c’est la période où le monde économique agricole traditionnel commence à disparaître sous les coups de boutoir d’une industrialisation à tout crin, avec comme mots d’ordre, la rentabilité et la mécanisation, plus connue sous le nom de « modernisation de l’agriculture » 15.

« Alors, tu me le rends ce petit service ?… Nous sommes pourtant de la même famille ! », réplique dans le film, Les Grandes Familles de Denys de La Patellière)

Pour aborder une autre disparition à laquelle nous assistons actuellement — celle du capitalisme industriel « type fordiste » 16, programmée par la finance mondialisée — il me semble intéressant de prendre comme exemple deux fictions pour mieux faire sentir la différence avec le documentaire, et mettre en exergue leurs spécificités. Nous savons que « cette guerre » n’est pas d’aujourd’hui, et on se rappelle que, même aux États-Unis, F.D. Roosevelt a dû imposer le New Deal pour relancer l’économie et barrer la route aux ambitions des trusts et financiers. Denys de La Patellière, dans son film, Les Grandes Familles (1958), met magistralement en scène ce conflit d’intérêt entre la finance et le grand patronat de l’après-guerre, en s’inspirant du roman de Maurice Druon (1948), qui traite de cette question à travers les violentes confrontations qui surgissent au sein-même des familles de cette haute bourgeoisie. Le cinéaste a choisi Jean Gabin pour incarner l’industriel despotique et sans état d’âme, et Pierre Brasseur, le spéculateur « subversif » et prêt à tout, avec Michel Audiard comme dialoguiste. Le spectateur, qui se délecte, est ainsi sensibilisé aux questions économiques du moment, sans être submergé par des explications complexes. Dans ce contexte, c’est le spéculateur qui se traîne aux pieds de l’entrepreneur pour lui demander « un petit service »… Ce dernier, pour donner une leçon à ce cousin quémandeur et insatiable, ainsi qu’à son fils, trop enclin à se fier à la bourse pour trouver de l’argent, met en place un stratagème démontrant qu’il peut, quand il veut, faire jouer en sa faveur les manipulations boursières : il fait chuter les valeurs de son entreprise en faisant courir le bruit de sa faillite, puis les rachète à la baisse et, en une séance, les fait remonter en flèche … Entre-temps, le fils, paniqué et déshonoré, se suicide. Le « vieux », un instant ébranlé, est très vite rassuré par l’arrivée de son petit-fils et la nouvelle de la débâcle de son cousin spéculateur. Son empire a désormais un bel avenir, et ainsi consolidé, peut s’accroître en toute tranquillité… Ces images de fiction nous font vivre « en direct » ce que fut, en France, l’un des enjeux majeurs de l’après-guerre, celui de juguler avec une poigne de fer la finance pour la mettre au service de la reconstruction du pays. C’est ce qu’on appelle « Les Trente Glorieuses », propices à l’enrichissement du patronat et à l’entretien de l’espoir chez les salariés.

Frédéric Lordon, dans sa pièce, D’un retournement l’autre (2011) — autre temps, autres mœurs — s’attaque, lui, à la suprématie actuelle des banquiers. Il surprend par une forme d’écriture en alexandrins qui sollicite l’écoute et un intérêt particulier pour le propos en facilitant la mémorisation de certaines formulations. Par ce choix de création, il tente de « […] trouver les formes susceptibles de hâter la transformation de nos cadres de penser… » 17, une recherche qu’il estime nécessaire et urgente pour réveiller les consciences contre le sentiment d’impuissance et de résignation. Reprenant le texte de la pièce, Gérard Mordillat dans son film, Le Grand Retournement (2013), conserve cet effet de surprise et d’attention particulière. Astucieusement, il choisit de montrer les banquiers en train de s’affairer dans une usine désaffectée en ruine, piétinant des bris de verre et des gravats de toits et de murs écroulés. Ainsi, il suggère très clairement le fait que leur domination s’est établie sur la destruction des empires industriels de nos sociétés. Plantés au milieu du décor, nous participons à leurs conciliabules pour tenter d’éviter la banqueroute… Nous les voyons ensuite triomphalement proposer au « chef d’état » d’opérer un « grand retournement », celui de faire rembourser leurs malversations par l’argent public. Devenus « le toit et les murs » de toute l’organisation sociale, leur perte serait de fait celle de toute la société… Le film laisse entendre que c’est peut-être une illusion, et que « cette ruine », dans laquelle ils se sont enfermés comme dans un bunker, risque de ne pas les protéger autant qu’on le croit… Une autre force pourrait bien s’organiser et finir par les balayer… Dans un raccourci saisissant, ce film théâtralise ce moment décisif et historique où la finance s’empare de tous les rouages économiques et politiques d’un pays. Frédéric Lordon parle d’une « prise en otage cosmique » des populations, par la détention du monopole de toute la circulation de l’argent 18.

Quels rapports entre les téléviseurs de chez Daewoo et les dollars de chez Clearstream ?

Depuis 1945 en France, la finance cherche à prendre sa revanche sur le programme du CNR (Conseil National de la Résistance) 19, et semble très près de réussir. Désormais, la situation est devenue singulièrement compliquée… Plus explicatif, le documentaire de Denis Robert, L’Affaire Clearstream, raconté à un ouvrier de chez Daewoo (2002) — qui reprend les étapes de l’enquête qu’il a menée et déjà dévoilée dans un livre (Révélation$, Les Arènes, 2001), et un premier film, Les Dissimulateurs (2001) — tente sur un mode pédagogique (comme l’annonce le titre), de révéler comment circulent les capitaux en partant d’un site de production, l’usine de Daewoo en Lorraine, jusqu’aux marchés financiers internationaux. Ce qui déclenche cette investigation, comme l’indique le début du film, c’est qu’« on ne voit jamais le rapport entre les millions qui filent vers les paradis fiscaux et les usines qui ferment en bas de chez nous ».

À noter que ce film ne parle pas seulement du mode de fonctionnement de l’économie mondiale actuelle, mais il fait aussi le compte rendu d’une action judiciaire menée contre la multinationale Clearstream, accusée de dissimulations de transferts de fonds, titres et valeurs et de blanchiment d’argent… Même si cette procédure n’a que brièvement ébranlé les places financières, cette démarche devrait toutefois être porteuse d’espoir en démontrant qu’il est possible d’atteindre ces hautes sphères occultes de la finance !

Dans ce documentaire, au contraire, peu de métaphores, de jeux de langage, de représentations au deuxième degré comme dans le circuit de la tomate et les deux fictions précédentes. Au contraire, le réalisateur reste au plus près des documents, des mots et des faits, et on comprend qu’il faut être vigilant et à l’affût de la moindre preuve. Les entretiens qui se succèdent servent à répondre à des questions précises — comme par exemple : « Qui utilise Clearstream et pourquoi ? ». Ils sont encadrés par un commentaire en voix off qui souligne les erreurs, les écarts, les déclarations vraies ou fausses des différents protagonistes, clairement présentés en début de film.

Bien que les images de ce film dans leur ensemble soient discursives et suivent un raisonnement démonstratif, voire font office de dénonciation, certaines sont choisies pour en dire plus que les paroles. Par exemple, les images récurrentes des listings sans fin qui défilent devant nos yeux sont non seulement la traçabilité du nom des banques et des multinationales, clientes de Clearstream, mais aussi, une façon de nous faire sentir et concevoir une nouvelle forme de « monnaie » et sa circulation : ce sont de simples enregistrements électroniques qui ne cessent d’être transformés par des mains qui tapotent sur des claviers, difficilement repérables quant à leur origine, déplacements, objectifs et représentation. Le spectateur est invité à entrer dans la peau d’un détective pour découvrir ce qui se cache derrière ce flux rapide et continu de noms numérotés, insaisissable, et qui ne devient compréhensible que grâce au long travail d’investigation de Denis Robert et aux révélations courageuses et risquées des concepteurs du logiciel, capables de révéler ce type de transactions.

Cependant, le choc provoqué par la révélation de ces manipulations hautement technologiques, serait-il le même aujourd’hui ? En effet depuis plus de dix ans, l’outil informatique s’est banalisé et un nombre croissant d’individus a pris l’habitude de l’utiliser pour réaliser leurs propres transactions bancaires… Le tout pouvoir technologique est passé dans les mœurs, et la méfiance à son égard s’est muée en soumission consentante et perte de vigilance. Le circuit demeure pourtant le suivant : le fait qu’« une usine de télévisions rapporte 2 à 3 % […] et un placement en bourse 3 ou 4 fois plus, le choix apparaît simple ». Les subventions octroyées pour maintenir la production sont utilisées à transformer celle-ci en actif financier, au prix du sacrifice des salariés. « L’argent qui n’est pas réinvesti […] s’échappe grâce à des outils aussi performants que celui de Clearstream. […] Et quand un secteur passe sous le contrôle des financiers, il est mort […] même si l’usine fait des bénéfices ! ». Or, le nom de Daewoo figure plusieurs fois sur le listing de Clearstream !… N’oublions pas que les performances de ces outils permettent de mettre sous contrôle tous les comptes courants, et de dissimuler efficacement les transactions des banques et des multinationales… « Clearstream a favorisé l’évasion de capitaux : 150 milliards sont sortis d’Argentine et la dette est de 135 milliards… » 20. Certains s’en doutaient déjà et mettaient en accusation les paradis fiscaux, mais désormais, grâce à cet incroyable travail de recherches pugnaces, les preuves sont là.

Par ailleurs, la polysémie du grand feu qui brûle sur le parvis de l’usine, et qui réchauffe les ouvriers en attente de leur sort, est cinématographiquement rendue par un gros plan en contre plongée sur les flammes qui semblent alors atteindre l’enseigne de Daewoo. Il semble s’accorder avec l’expression des visages fatigués des salariés, qui ont déjà compris que leurs emplois allaient partir en fumée, et dont les regards ne reflètent plus que tristesse et résignation… De ce fait, cet immense bûcher ne manque pas d’évoquer la détermination destructrice des financiers dont le seul objectif est de réduire en cendres ce monde industriel qui fait obstacle à leur cupidité (voir Le Triomphe de la cupidité de Joseph E. Stiglitz) 21. Que faire alors pour transformer l’ardeur de ce feu en symbole de colère et de révolte ou en feu de joie préparant la victoire ?

Ce documentaire qui tente d’apporter une réponse en informant, illustre bien la difficulté de trouver une forme cinématographique dont les représentations puissent à la fois toucher et marquer les esprits tout en facilitant l’assimilation et la maîtrise de notions complexes afin de redonner des perspectives et de l’impulsion à l’action…

Comment faire pour impliquer les autres dans la réalisation de son propre désir ?

Avec la prise de contrôle de l’économie par la finance, la société tout entière va finir par fonctionner uniquement sur le modèle de la bourse. On assiste désormais, côté occidental, au remplacement progressif du monde industriel (dit producteur de richesses) par des sociétés de services transformés en produits financiers. Les produits circulent, à la vitesse de l’éclair sur le marché mondial où ils sont joués à pile ou face, selon le principe de la logique du profit à court terme, avec exigence de rendement immédiat du capital. Il est de plus en plus visible que ce système appauvrit irrémédiablement les pays qui sont sous sa coupe, d’autant plus que les pertes (en terme de production, d’emplois, d’évasion des capitaux…) sont compensées, pour maintenir la paix sociale (RSA, subventions aux entreprises, renflouements des banques…), par la création de dettes aux taux d’intérêts variables, qui creusent le déficit de manière exponentielle, et rendent la créance infinie et « irremboursable ». Cette dette, qui n’est autre que la captation de la richesse d’un pays par la finance, est alors brandie comme un épouvantail au nez des populations pour leur faire accepter la récession sociale, grâce au « grand retournement »… Et ainsi, « la défense de l’idée de progrès est corrélée à la justification de la servitude » 22.

Cette nouvelle donne impose effectivement de changer nos modes de représentations devant la nécessité urgente de donner un coup d’arrêt à cette technologie financière et de changer ce modèle de développement. Cette épreuve est d’autant plus difficile à surmonter que, comme l’a analysée Naomi Klein, dans La Stratégie du choc23, la réflexion est mise régulièrement sous tensions brutales (catastrophes, terrorisme, immigration, chômage, guerres…), habilement amplifiées par les médias, qui déstabilisent complètement le corps social. Ces « chocs » successifs le conduisent à un repli sur lui-même, accompagné d’une demande croissante de sécurité policière, et d’une acceptation, sans réaction critique, de toutes les transformations néolibérales fondamentales de la société. Ainsi, la plus grande part de l’organisation sociale est phagocytée par ce système, présenté comme incontournable… Les différents acteurs sont pris à l’intérieur de cet énorme processus, forcés d’y entrer par un biais ou par un autre, comme travailleur, chômeur, retraité, consommateur, contribuable, épargnant, endetté… de façon à ce que le capitalisme puisse tirer profit de toutes ces situations. Ainsi, l’ensemble de la société est impliqué dans la réalisation du désir capitaliste, ce que Frédéric Lordon appelle « un rapport d’enrôlement ». Il y ajoute ceci : « On peut mesurer la profondeur de l’incrustation de la servitude capitaliste, à ce qu’elle n’étonne plus personne […] Comment alors construire avec entrain une puissance d’agir contre l’entreprise, c’est-à-dire contre le désir du capital ? » 24.

Il me semble, comme Zola le décrit dans son roman (L’Argent, 1891) que le capitalisme durera tant qu’il représentera une force d’attraction irrépressible, liée au désir de s’enrichir : « […] la passion descendue du salon à l’office, du bourgeois à l’ouvrier et au paysan, et qui jetait, dans ce galop fou, des millions de pauvres souscripteurs n’ayant qu’une, trois, quatre, dix actions… » La transposition de ce roman au cinéma, réalisée par Marcel L’Herbier, illustre de manière exemplaire cette description dans la scène finale du film : Saccard, le spéculateur sans scrupule, qui a ruiné tous ses actionnaires, condamné, s’apprête à entrer dans sa cellule. Au gardien qui se tient devant la porte, il lance : « Dans six mois je suis libre et j’ai une idée d’une affaire épatante… Si vous voulez, je vous ferai gagner de l’argent, beaucoup d’argent ! ». Un rapide coup d’œil autour de lui, et le gardien s’engouffre avec Saccard dans sa cellule… Mais quel(le) est celui (ou celle) qui, en caméra subjective, s’avance avec prudence mais détermination, pour voir derrière l’œilleton ce qui se passe à l’intérieur ?

Le capitalisme financier structure tout autour de ce désir qu’il transforme en principe moteur de toute l’énergie sociale au service de ses propres intérêts. Il séduit en libérant ce désir de toute culpabilité, et en prônant ouvertement et adroitement un « enrichissez-vous » comme ressort d’émancipation possible ! Inconsciemment ou non, « désirer y devient majoritairement désirer selon l’ordre des choses capitaliste… » 25.

Un défi pour le documentaire

Filmer l’économie c’est donc filmer l’invisible, c’est-à-dire, les forces et les mécanismes abstraits et sous-jacents dont nous ne voyons que les effets. Alors, la tentation est grande de ne faire du documentaire qu’une succession d’entretiens d’experts qui expliquent rationnellement la situation… Dans ce cas, la critique sévère de Frédéric Lordon est assez dissuasive : « Il faut toute la cécité des demi-intellectuels pour ne jamais voir que les idées pures n’ont jamais rien amené, sauf à être accompagnées et soutenues d’affects, qui seuls peuvent les doter de force ». Il s’agirait donc plutôt de rechercher une forme qui permette de faire ressentir comment les idées, les valeurs, les événements nous affectent, entrent dans nos corps et nos esprits, car « L’époque ne cesse de nous traverser… Nous sommes agis plus que nous agissons… sommes parlés plus que nous parlons… » 26. L’intelligibilité de la réalité par le sensible devrait permettre de mieux s’en saisir en remobilisant des énergies et des envies d’agir et de réagir…

Il semble bien que le film de fiction, en tant que création artistique, soit plus à même de transformer les idées en formes sensibles. Effectivement, la possibilité d’inventer un récit avec le choix de faire apparaître, et d’une certaine façon, des types de personnages avec des dialogues appropriés, dans des décors adéquats, donne cette liberté de pouvoir composer avec les sensations et les sentiments. Par ailleurs, grâce au jeu subtil de l’identification et de la place de la caméra, le spectateur peut lui aussi entrer dans la scène et participer ainsi plus directement aux affects représentés, avec, toutefois, le danger d’une identification fusionnelle sans distanciation, telle que Brecht la définissait 27. En ce qui concerne le documentaire, les possibilités semblent plus limitées et complexes, mais relever le défi n’est peut-être pas impossible…

Dans L’Île aux fleurs, Jorge Furtado opte pour une forme qui envahit tout le propos, et le structure, en jouant sur la rupture de causalité (enchaînement d’arguments et d’images absurdes et loufoques), destinée à heurter et gêner la compréhension immédiate. Toutefois, le ton d’humour joyeux de l’ensemble, sort le spectateur de l’hermétisme et de l’indifférence différence en bousculant sa réflexion et son questionnement. Ce documentaire réussit à rendre visible le fait que, sous l’apparente rationalité de nos échanges d’argent quotidiens, se dissimulent peut-être d’autres forces et logiques à débusquer et à comprendre pour envisager des façons de vivre différentes. C’est par cette forme complexe, que ce documentaire nous atteint d’abord par des affects (gêne, rire, doute…) pour solliciter notre réaction, puis notre réflexion.

Presque à l’opposé, Denis Robert, dans L’Affaire Clearstream, racontée à un ouvrier de chez Daewoo, propose au contraire, par un montage rigoureux, une démonstration-dénonciation, en suivant une linéarité narrative stricte. Bien que complexe, le déroulement des explications tient le spectateur en haleine et maintient son attention éveillée par un dévoilement progressif sur le modèle de l’enquête policière. Piqué au vif, le spectateur est en quelque sorte mis au défi devant les énigmes à résoudre. Ici, la performance est celle, entre autres, de rendre visible un chaînon manquant en reconstituant les liens logiques occultés entre salariés et haute finance. Avec l’impression d’avoir été si près de pouvoir remporter une vraie grande victoire, ce film aiguillonne aussi notre envie de poursuivre le combat. Bien qu’utilisant la forme de la démonstration didactique, ce documentaire passe aussi par l’affect (comme décrit ci-dessus) pour retenir notre attention et susciter une certaine jubilation.

D’autres documentaires ont réussi ce genre de performance, celle de faire surgir de l’invisible une forme intelligible et attractive, qui motive l’intérêt du spectateur, et mobilise son énergie. Toutefois, il ne faudrait pas s’illusionner, comme nous en avertit Jacques Rancière : « On ne passe pas de la vision d’un spectacle à la compréhension du monde et d’une compréhension intellectuelle à une décision d’action. On passe d’un monde sensible, à un autre monde sensible… » 28. Pour passer de ce monde sensible à un « que faire ? » dans le monde réel, une première étape indispensable, me semble-t-il, réside dans le fait de pouvoir projeter régulièrement en salle ces documentaires, afin d’amplifier la circulation des regards et des paroles, et que, de ce laboratoire de rencontres et de confrontations nécessaires, puissent émerger des propositions plausibles et efficaces pour une réorganisation sociale différente… 29.

Pour continuer à tonifier nos énergies, gageons que de nombreux documentaires encore sauront s’inspirer de cette définition que Francis Ponge donne de sa propre poésie : « Une raison qui ne lâcherait pas en route le sensible » 30.


  1. En plus de nombreux ouvrages sur le capitalisme financiarisé et ses crises, Frédéric Lordon, mène des recherches spinozistes en sciences sociales : Spinoza et les sciences sociales. De l’économie des affects à la puissance de la multitude, en collaboration avec Yves Citton, Paris, Éditions Amsterdam, 2008 – Capitalisme, désir et servitude, Marx et Spinoza, Paris, La Fabrique, 2010 – La Société des affects. Pour un structuralisme des passions, Paris, Seuil, 2013. Cherchant des passerelles entre art et économie, il explicite sa démarche dans « Surréalisation de la crise », en post scriptum à sa pièce de théâtre, D’un retournement l’autre, Seuil, 2011.
  2. Jorge Furtado, L’Île aux fleurs,1989.
  3. Yves Allegret, Prix et profits, 1932.
  4. Ladaique Maxime, « Les inégalités de revenus augmentent dans les pays de l’OCDE », entretien publié par l’Observatoire des inégalités, 23 juillet 2013.
  5. Joseph A. Schumpeter estime que l’histoire du capitalisme est « une mue » permanente : la technologie qui évolue pousse des pans entiers de l’activité économique à disparaître après avoir été dominants, Les Cycles des affaires, 1939 ; Capitalisme, socialisme et démocratie, 1942 ; Histoire de l’analyse économique, 1954.
  6. Denys de La Patellière, Les Grandes Familles, 1958. (Scénario et adaptation : Denys de La Patellière et Michel Audiard, dialogues : Michel Audiard), d’après le roman de Maurice Druon (1948), Les Grandes Familles, Plon, réédition 1999.
  7. Gérard Mordillat, Le Grand Retournement, 2013, d’après la pièce de Frédéric Lordon, D’un retournement l’autre, Seuil, 2011.
  8. Denis Robert, L’Affaire Clearstream, racontée à un ouvrier de chez Daewoo, 2002 et Les Dissimulateurs, 2001, ces deux films reprennent les éléments de son livre : Révélation$, Les Arènes, 2001.
  9. « La chambre de compensation » veille, entre autres, à garantir la bonne fin des opérations sur les marchés boursiers entre la négociation et le règlement-livraison des titres.
  10. André Orléan et Michel Aglietta, La Monnaie entre violence et confiance, Éd. Odile Jacob, 2002.
  11. Frédéric Lordon, émission du 30 septembre 2010 : « D@ns le texte » d’Arretsurimages.net, « Le capitalisme a organisé la dépendance à l’argent ».
  12. Marcel L’Herbier, L’Argent, 1928, d’après le roman d’Émile Zola, L’Argent (1891), Flammarion Poche, réédition 2009.
  13. Claude Pazienza, L’Argent raconté aux enfants et à leurs parents, 2002.
  14. Frédéric Lordon, Capitalisme, désir et servitude, Marx et Spinoza, La Fabrique, 2010.
  15. La revue, Vie à la campagne, en mars 1929, titrait « Vers le machinisme total indispensable ». La « modernisation » de l’agriculture a été dopée, après la Première Guerre mondiale, par la reconversion de l’industrie militaire : matériel (chars d’assaut…) dans le machinisme agricole, poudres et explosifs dans la production massive d’engrais, armes chimiques dans les insecticides, notamment.
  16. Le fordisme, selon Henry Ford (1863-1947), représente une sorte de « compromis économique et social vertueux ». Ford voulait que ses ouvriers soient bien payés pour qu’ils puissent acheter les voitures qu’ils fabriquaient eux-mêmes. L’augmentation régulière des salaires au rythme des gains de productivité était conçue pour assurer des débouchés et éviter la surproduction.
  17. Frédéric Lordon, op. cit.
  18. Emission de France 2 – Frédéric Taddéi, Ce soir ou jamais !, 12 septembre 2011 : comment sauver les banques et à quel prix ?
  19. Les politiques néo-libérales ont pris comme cible le programme politique du Conseil National de la Résistance, mise en place à la Libération : la nationalisation de l’énergie, des assurances et des banques, la création de la Sécurité sociale.
  20. Toutes les citations de ce paragraphe sont tirées du film de Denis Robert, L’Affaire Clearstream, racontée à un ouvrier de chez Daewoo, 2002.
  21. Joseph Eugène Stiglitz, Le Triomphe de la cupidité (titre original : Freefall : America, Free Markets, and the Sinking of the World Economy), Éd. Les Liens qui libèrent, 2010.
  22. Le Gouvernement par la peur au temps des catastrophes, ouvrage collectif, Éd. de la Roue, 2013.
  23. Naomi Klein, La Stratégie du choc, Actes sud, 2013 et auteur du scénario du film du même nom, réalisé par Michael Winterbottom et Mat Whitecross en 2009.
  24. Frédéric Lordon, op. cit.
  25. Frédéric Lordon, ibid.
  26. Frédéric Lordon, ibid.
  27. « Pour que toutes ces prétendues données puissent devenir objet de doute, il faudrait cultiver cette manière de regarder les choses en étranger, comme le grand Galilée considerant les oscillations d’un lustre. Galilée était stupéfait de ces balancements, comme s’il ne s’y attendait pas et n’y comprenait rien ; c’est de cette façon qu’il découvrit ensuite leurs lois. Voilà le regard, aussi inconfortable que productif, que doit provoquer le théâtre par les représentations qu’il donne de la vie en société. Il doit forcer son public à s’étonner, et ce sera le cas grâce à une technique qui distancie et rend étrange ce qui est familier »
    B. Brecht, Petit Organon pour le théâtre, trad. B. Lortholary, in Écrits sur le théâtre, Paris, Gallimard/ Pléaide, 2000.
  28. Jacques Rancière, Le Spectateur émancipé, La Fabrique, 2009.
  29. Marie-José Mondzain, Le Commerce des regards, Seuil, coll. L’ordre philosophique, 2003.
  30. Francis Ponge, « La Nouvelle Araignée », dans Pièces, Œuvres complètes, Tome 1, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, Paris, 1999.

  • La Stratégie du choc | Naomi Klein | 2010 | 1h19
  • Le Grand Retournement | Gérard Mordillat | 2012 | 1h17
  • L’Affaire Clearstream, racontée à un ouvrier de chez Daewoo | Denis Robert, Pascal Lorent | 2003 | 1h05
  • L’Argent raconté aux enfants et à leurs parents | Claudio Pazienza | 2002 | 5’
  • L’Ile aux fleurs | Jorge Furtado | 1989 | 12’
  • Prix et profits | Yves Allegret | 1932 | 20’

Publiée dans La Revue Documentaires n°25 – Crises en thème. Filmer l’économie (page 29, Mai 2014)
Disponible sur Cairn.info (https://doi.org/10.3917/docu.025.0029, accès libre)