Investir la parole, accueillir les spectres

Enjeux et déplacement du texte chez Rithy Panh

Maylis Laureti

En 2010, alors que se prépare à Phnom Penh le second procès de Kaing Guek Eav dit Duch, responsable de la police politique et directeur du principal centre de torture et d’exécution cambodgien sous le régime khmer rouge, le cinéaste Rithy Panh obtient la permission de rencontrer ce dernier et de le filmer. Duch est le premier des anciens cadres khmers rouges à être jugé pour les crimes commis entre 1975 et 1979 par le gouvernement de Pol Pot. Il a fait appel de la décision du tribunal qui l’a condamné pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, et attend sa seconde comparution. Rithy Panh, quant à lui, a déjà consacré plusieurs films à cette période douloureuse de l’histoire du Cambodge et a notamment filmé les bourreaux officiant sous les ordres de Duch au centre S21 1.

La rencontre entre le cinéaste et l’ancien responsable khmer rouge donne lieu à un long et difficile face-à-face, dont résultent quelques trois cents heures d’entretiens filmés. Accablé par l’épreuve, Rithy Panh dit se sentir « vaciller 2 ». Confronter Duch à ses actions passées suppose en effet, pour le cinéaste, d’« entrer dans son univers, son idéologie 3 » – entreprise dont il pressent qu’elle menace sa propre intégrité. Alors qu’il craint de perdre pied, une expérience se présente comme salutaire : sortir de la perspective du bourreau pour adopter la sienne propre, et pour ce faire, témoigner de ce que lui-même a vécu sous le régime khmer rouge. Bien qu’il n’ait jusqu’alors jamais fait état de son statut de survivant dans ses films, Rithy Panh a été déporté enfant et a vécu quatre ans de travail forcé dans les rizières cambodgiennes, où il a perdu presque toute sa famille 4. Avant la rencontre avec Duch, cette expérience de la déportation n’avait fait l’objet d’aucun récit. À son arrivée en France en 1980, après la chute du régime khmer rouge, Rithy Panh s’est abstenu de raconter à ses proches les épreuves vécues durant ces quatre années. Les films qu’il réalise jusqu’à la fin des années 2000 présentent les difficultés du Cambodge contemporain (La Terre des âmes errantes5, Les Artistes du théâtre brûlé6, Le Papier ne peut pas envelopper la braise7) ou évoquent l’exécution et la torture des prisonniers politiques au temps des Khmers rouges (Bophana8, S219), mais n’abordent pas frontalement la déportation de la population cambodgienne, et demeurent à distance de l’expérience vécue du cinéaste.

C’est donc une histoire tue depuis trente ans, jamais formulée ni énoncée, que Rithy Panh ressent le besoin de faire émerger suite à sa confrontation avec Duch. La venue aux mots de cette expérience intime se fait en deux temps. Rithy Panh en confie tout d’abord le récit à un ami, l’écrivain français Christophe Bataille. Charge ensuite à celui-ci de faire naître la parole de Rithy Panh à l’écriture, de faire advenir, à partir de bribes de souvenirs décousues, un récit à la première personne. De cet étroit dialogue entre le cinéaste et l’écrivain résulte L’Élimination10, un livre relatant à la fois les échanges avec Duch et les souvenirs intimes du génocide. La chronique du tournage en est la trame principale, et c’est dans ses interstices que surgissent les souvenirs.

L’écriture du livre et le montage des entretiens sont menés de front, si bien que la publication de L’Élimination en janvier 2012 coïncide avec la sortie au cinéma de Duch, Le Maître des Forges de l’Enfer11. Les deux œuvres, en miroir, se répondent. Le film, tout entier empli de la parole du bourreau, efface la présence de Rithy Panh, dont le corps et la voix sont retranchés. Le livre, au contraire, fait entendre la parole du cinéaste. Les entretiens avec Duch sont conduits en langue khmère, le récit intime est écrit en français.

Le chapitre n’est cependant pas clos. Après s’être ressaisi de son expérience par les moyens de la littérature, Rithy Panh entreprend la réalisation de L’Image manquante12, qu’il achève en 2013. Alternant entre des images d’archives et des souvenirs rapportés dans L’Élimination, le film construit un aperçu de la déportation en se concentrant sur quelques scènes juxtaposées sans ordre apparent, sans chronologie évidente. Ces scènes issues des souvenirs de Rithy Panh sont portées à l’écran selon un procédé singulier. Des figurines d’argile à l’effigie des protagonistes sont disposées dans des décors à échelle réduite. Ces tableaux immobiles sont ensuite filmés longuement, balayés par la caméra. Les plans ainsi obtenus sont transmis à Christophe Bataille, sans indications ni directives, afin qu’il compose le commentaire du film. L’écrivain, qui a à présent une connaissance intime des souvenirs de Rithy Panh, identifie les figures et les situations, et leur associe des récits issus de L’Élimination.

En dépit de ce qu’il pourrait sembler, L’Image manquante n’est pas une « adaptation » de L’Élimination. Il ne s’agit pas d’une transposition, mais plutôt d’une reprise, ou plus exactement, d’un retour. Un retour aux souvenirs de L’Élimination, et un retour des souvenirs de L’Élimination. Plus frappant encore, ce retour du récit s’accompagne d’un retour du texte qui est repris sous une forme altérée, cité par fragments, évoqué par allusions, présent jusque dans les omissions et les manques. Il s’évide, se déleste des détails, prend une forme moins narrative, plus dense, plus poétique, volontiers elliptique. Mais le lexique reste, certaines formulations demeurent, parfois même des phrases entières. Ces résurgences sont multiples, et traversent tout le film. Le souvenir du corps meurtri d’une des sœurs de Rithy Panh en fournit un exemple. Son évocation résonne d’une œuvre à l’autre. On lit ainsi dans L’Élimination : « Son visage a enflé, puis ses pieds, ses jambes, ses mains. Elle était à la fois maigre et bouffie. Comme emplie d’eau 13. » Et en écho, L’Image manquante reprend : « Je ne souhaite à personne de voir un enfant mourir, les pieds enflés, le visage enflé comme s’il ne restait que de l’eau. » À l’image de cette scène, le commentaire du film est tout entier tramé du souvenir du texte de L’Élimination.

Pourquoi cette reprise ? Quelle nécessité de revenir à un récit déjà conté, d’accueillir dans un film la forme altérée d’un texte déjà publié ? Dans ce passage d’une œuvre à l’autre, je perçois davantage qu’une évolution depuis une forme littéraire vers une forme cinématographique – d’autant que la migration du texte de L’Élimination ne s’achève pas avec la réalisation de L’Image manquante. Le commentaire du film a fait à son tour l’objet d’une reprise, et a été édité dans « une version revue et adaptée 14 ».

Si l’écriture de L’Élimination, suscitée par la confrontation avec Duch, permettait de faire émerger la parole de Rithy Panh, L’Image manquante relève manifestement d’une autre dynamique et opère un déplacement. Je voudrais étudier cet écart entre la première apparition du texte sous forme littéraire et sa réapparition dans L’Image manquante. Il s’agit de s’interroger sur ce qui motive sa venue à l’écriture, puis sa venue au film. Au-delà des seules évolutions formelles, il me semble que l’étude attentive du texte original et de sa reprise permet d’éclairer le geste qui préside aux deux œuvres, et les nécessités auxquelles elles répondent. Je questionnerai donc tour à tour l’émergence du récit à la première personne qui s’accomplit dans L’Élimination et le déplacement qu’opère le retour altéré du texte dans le film L’Image manquante.

Émergence d’un texte, émergence d’un sujet

Avec L’Élimination, Rithy Panh, par l’entremise de Christophe Bataille, entreprend son premier récit à la première personne. Faire part de ses années de déportation, que ses films n’avaient jusqu’alors jamais évoquées, c’est offrir sa mémoire en partage, mais c’est surtout l’occasion de venir à la parole, de s’en faire le sujet. Contre le chancèlement et le vertige que fait naître le face à face avec Duch, l’écrit offre un moyen de quitter la perspective du bourreau et de réintégrer la sienne propre.

Résister à Duch

Si le récit intime émerge entre les lignes de la rencontre avec Duch, c’est avant tout parce que ce dernier s’affirme comme une puissance de disparition. Il est celui qui, littéralement, a fait disparaître des milliers d’hommes, qui les a « réduits en poussière », selon la terminologie des Khmers rouges 15. Mais il est surtout celui dont la langue escamote, supprime et dérobe. Duch fait disparaître tout à la fois les faits et les individus, mettant en péril l’existence même. Par son usage du langage, Duch fait œuvre de disparition. C’était le sens de son travail à S21, visant à obtenir des aveux mensongers sous la torture – aveux méticuleusement consignés et archivés, seule trace subsistant des êtres systématiquement détruits et effacés 16. L’œuvre de Duch sous les Khmers rouges était de substituer aux êtres une fiction conforme aux représentations et aux affirmations de l’Angkar.

Trente ans plus tard, il n’opère pas autrement. Toutes ses évocations du passé, de ses actions et de son travail relèvent d’une semblable stratégie de falsification et d’oblitération. « Il parle. Parle sans cesse. Ajoute. Efface. Aménage. Il bâtit ainsi une histoire, déjà une légende, un autre réel 17 ». À Rithy Panh qui lui rend visite et le filme, il affirme qu’il aurait pu être à sa place et aurait fait un bon directeur de S21 18. Ainsi, Duch fait disparaître la réalité du génocide et jusqu’à l’expérience intime de Rithy Panh, qui d’ancien déporté se mue dans son propos en bourreau en puissance. Duch réaménage le réel et fait disparaître une seconde fois les victimes. À nouveau, l’individu et la réalité de ses actes sont niés, effacés, renvoyés au néant. C’est cette menace qui fait vaciller Rithy Panh. C’est parce que Duch nie son existence que le besoin d’écrire l’expérience vécue se fait impérieux.

Plus encore, c’est parce que les victimes sont niées et méprisées qu’il importe de se faire le témoin de leur dignité, de les citer, de les nommer, de raconter leurs actions, leurs résistances. Individuellement, à hauteur d’homme. Car le récit à la première personne, chez Rithy Panh, vise moins à témoigner de ce qu’on a soi-même traversé que des actes de courage et d’humanité auxquels on a assisté. Contre la suppression de l’individu mise en œuvre par les Khmers rouges, qui avaient entrepris d’effacer toute singularité en imposant une tenue et une coiffure unique, en proscrivant les liens amoureux et familiaux et en amputant les noms, tous réduits à une syllabe, il s’agit pour le survivant d’affirmer la valeur de l’existence singulière, d’évoquer ceux qui « sont morts parce qu’ils ont défendu leur parcelle de vérité et de dignité 19. ».

Dire la résistance, et résister soi-même. C’est le refus d’abdiquer sa conscience qui est en jeu dans L’Élimination, et le lieu par excellence de cette résistance est la parole. À de nombreuses reprises, dans le récit de Rithy Panh, l’exercice de la parole est celui d’une liberté. C’est le cas pour son père, n’ayant plus, une fois déporté, « que sa mémoire, cette réserve de mots poétiques et vains 20 ». Bien que sa culture et son éducation ne lui soient d’aucune utilité pour survivre sous le régime khmer rouge, son impuissance n’est nullement raillée par Rithy Panh, qui se remémore avec émotion son refus d’y renoncer. S’obstinant malgré l’interdiction à parler français avec un homme de sa connaissance, puis seul, « rentr[ant] dans le langage 21 », le père s’oppose au sort qu’on lui fait subir. Trente ans plus tard, Rithy Panh perçoit le sens de ce geste, qu’il commente ainsi :

Parler français dans un village khmer rouge, alors que les grands crimes ont commencé, alors qu’on est soi-même fils de paysan illettré, c’est un acte politique qui signifie : ce langage est à moi. Je l’ai acquis pour être un homme, et pour le transmettre. Alors faites la révolution. Répétez vos slogans à l’infini. Mais cette conscience et ce savoir, vous ne pourrez pas me les retirer. Si vous voulez mon silence, il faudra me tuer 22.

La mère, elle aussi, résiste verbalement. Lorsque le corps de son mari est roulé dans une feuille de zinc et enterré hâtivement, elle refuse d’assister à ces funérailles indignes et lui fait à la place un « enterrement de mots 23 ». Restée seule avec son fils, elle lui raconte les véritables obsèques de son époux, celles qui auraient dû être les siennes et qu’elle lui offre par la parole, invoquant les convives absents, décrivant le cérémonial et les rites, étendant la durée de ce récit autant qu’il lui est possible. Dans le souvenir de Rithy Panh, cette cérémonie intime dure la nuit entière.

Leur fils manifeste les mêmes dispositions. Enfant, lors des années de déportation, il en montre déjà les signes. Lui-même ne qualifie pas d’actes de résistance les initiatives qu’il rapporte dans L’Élimination et les présente plutôt comme des prises de risques inconsidérées, il en souligne la dimension spontanée et irréfléchie. Pourtant, il s’agit bien à chaque fois de jouir de l’usage des mots et de s’affirmer homme et sujet dans cet usage – au péril de sa vie. Ainsi fait-il le récit de la mission Apollo 11 et des premiers pas sur la lune – ce qui ne manque pas de passer pour de la propagande pro-américaine. C’est son plaisir de conteur qui lui fait commettre cette imprudence et non la volonté de défier les Khmers rouges et leur représentation du monde. Le geste n’en a que plus de force : que l’on puisse prendre plaisir aux mots au point de risquer sa vie, c’est une affirmation d’humanité indéniable. Une autre fois, il lit tout haut un mot français inscrit sur une boîte de médicaments. Une autre fois encore, il calligraphie un slogan khmer rouge sur un tableau noir, révélant une aptitude qui pourrait suffire à le faire condamner. Dans son dénuement extrême, dans cet « état de non habeas corpus24 » qu’il décrit, les mots lui restent.

Face à Duch et à la déshumanisation que ce dernier reconduit et perpétue, les mots sont à nouveau, pour Rithy Panh, le dernier recours.

Devenir sujet de la parole, de la mémoire et de l’Histoire

Mais il y a plus qu’une résistance à la disparition dans le projet de L’Élimination. La parole y ouvre la possibilité d’être le sujet de sa propre histoire – le sujet de ses actions et de sa mémoire. C’est ce que Rithy Panh espérait pour Duch lorsqu’il a entrepris de le filmer. Il s’en explique à plusieurs reprises, réaffirmant sans cesse l’importance que revêt pour lui la parole :

[Je cherche] la parole. Je veux que Duch parle et s’explique – surtout lui ; qu’il dise sa vérité ; son parcours ; ce qu’il a été, ce qu’il a voulu ou pensé être, puisque, après tout il a vécu, il vit, il a été un homme, et même un enfant. Qu’en répondant ainsi, le fils de commerçant malhabile et endetté, l’élève brillant, le professeur de mathématiques respecté par ses élèves, le révolutionnaire qui cite encore Balzac et Vigny, le dialecticien, le bourreau en chef, le maître ès tortures, chemine vers l’humanité25.

Duch est un homme. Et je veux qu’il soit un homme. Non pas retranché, mais rendu à son humanité par la parole 26.

Cheminer vers l’humanité, c’est ce que doit permettre la parole, en tant qu’elle donne l’occasion à celui qui l’exerce de se constituer en sujet. Cette subjectivité fondée dans la langue est celle qu’évoque Émile Benveniste, qui affirme :

C’est dans et par le langage que l’homme se constitue comme sujet ; parce que le langage seul fonde en réalité […] le concept d’ « ego ». La « subjectivité » dont nous traitons ici est la capacité du locuteur à se poser comme « sujet ». Elle se définit, non par le sentiment que chacun éprouve d’être lui-même […], mais comme l’unité psychique qui transcende la totalité des expériences vécues qu’elle assemble, et qui assure la permanence de la conscience. […]
Est « ego » qui dit « ego » 27.

Cette subjectivité se manifeste lorsqu’un locuteur actualise la langue en parole, lorsque celui qui parle s’approprie ce « signe vide 28 » qu’est le je – signe vacant, disponible. C’est en occupant cette place vide de la langue que le sujet prend consistance, c’est le « discours » qui « provoque [son] émergence 29 ». Dès lors, ce n’est qu’en devenant sujet dans et par la parole que l’on peut devenir sujet de ses actions et de son regard.

Assumer à la première personne ses actes et, partant, sa responsabilité, c’est la possibilité qui s’offre à Duch. Mais encore faut-il « que la parole advienne 30 ». Or Rithy Panh observe que ce qui émane de Duch n’est qu’« une ritournelle 31 ». Duch n’exerce pas la parole : il joue du langage. Duch refuse de se constituer en sujet. Il se dérobe. Dans le film de Rithy Panh, une séquence rend cette attitude évidente : celle dans laquelle Duch prétend accepter la responsabilité de tous les crimes sans pour autant les reconnaître. Fausse bonne volonté et tentative d’acheter sa rédemption sans avoir à assumer véritablement ses actes, à les accuser, à les reconnaître siens, à en mesurer la portée tout en étant conscient d’en être l’auteur. Dissolution du je dans l’impersonnel. Rithy Panh, commentant le tournage, dit l’avoir repris :

Je lui ai répondu : « Monsieur Duch, vous endossez trop. Ce n’est pas ce que nous demandons. À chacun sa responsabilité, puisque les tortionnaires, eux, reconnaissent la leur. Et racontent 32. »

Mais Duch n’emploie que « des mots neutres 33 », se dissimule derrière un langage où « tout semble lisse, équivalent 34 ». En près de 300 heures d’entretien, il ne vient pas à la parole. Et il me semble que c’est précisément parce que le film échoue à l’y conduire qu’il devient nécessaire à Rithy Panh de se faire lui-même le sujet d’un récit à la première personne. Comme une contrepartie. Être homme puisque Duch ne sait pas l’être. Raconter l’Histoire, depuis sa propre place – puisque nul homme ne peut se tenir à la place d’un autre. S’astreindre à dire, puisque le bourreau, lui, se dérobe. Le cheminement qu’accomplit Rithy Panh avec L’Élimination vient en lieu et place de celui que Duch n’a pas entrepris. Il ne s’agit pas du même cheminement. Leur responsabilité n’est pas la même. Mais une commune exigence se présente à l’un et l’autre : se constituer en sujet de l’Histoire – pour que la mémoire puisse s’écrire.

Si Duch refuse de se soumettre à cette exigence, Rithy Panh, lui, accepte l’épreuve. Car c’est bien une épreuve. Ce qu’il a à affronter n’est certes pas sa propre inhumanité, cependant la mémoire est cruelle au survivant. Au point qu’il est tenté de renoncer parfois. Christophe Bataille rapporte qu’à la lecture du premier manuscrit de L’Élimination, Rithy Panh lui écrit : « Retire-moi. Supprime l’enfance 35. ». Tentation d’un retrait, de ne laisser subsister que le sujet qui pense l’Histoire et non celui qui l’a vécue. Le livre porte la trace de cette tentation, on y lit : « Je relis ces pages. Je voudrais effacer mon enfance. […]. Il ne resterait que Duch et moi : l’histoire d’un combat 36. ».

Mais le passé fait irruption. Le souvenir se manifeste sur un mode intempestif, qui tient du surgissement. « Si je ferme les yeux, aujourd’hui, tout me revient 37 », lit-on dans L’Élimination. Et plus loin : « Souvent des détails me reviennent, des images, des paroles. Je suis projeté dans le passé 38. » Ailleurs encore, sur un mode lancinant : « Des odeurs me reviennent, parfois.
Des détails oubliés. Je frissonne sous la pluie. Je devine des pas. Un buffle me frôle 39. ». Le souvenir est chevillé au corps. Contrairement à Duch, qui est tout en maîtrise et en méthode, pour qui le souvenir ne prend pas la forme intempestive du cauchemar ni de l’insistance, Rithy Panh « ne trouve chez [lui] que des sensations. Tout s’imprime en odeurs, en images et en sons 40 ». « Mesure tout humaine 41 », observe-t-il. Le passé est inscrit dans la chair, et il revient. C’est le terme employé à chaque fois. Pour ne plus y être projeté, entraîné, pour que le souvenir s’exprime autrement que par le vertige, il faut passer de la réminiscence à la mémoire. Autrement dit, passer par la parole. Ne plus être possédé par le passé, et devenir sujet de l’Histoire. Se saisir soi-même de la chance offerte en vain à Duch.

Ainsi, pour son propre salut, mais aussi et surtout parce que l’Histoire ne peut rester sans sujet, Rithy Panh saisit l’occasion qui lui est donnée de dire je. Une parole se lève. Une voix s’écrit. Le tournage documentaire suscite un texte, qui s’énonce à la première personne. La raison d’être et le sens de ce texte, dans sa première apparition, réside justement dans cette première personne. Dans L’Élimination, Rithy Panh se fait le sujet de son expérience passée. Le texte et le sujet naissent à la langue en même temps.

Ouvrir le texte aux spectres

Dans L’Image manquante, L’Élimination fait retour. Il ne s’agit pas d’une transposition, d’une adaptation – même si le terme est parfois avancé pour décrire le film. Ce qui se joue est tout autre. Ce n’est pas le récit seul, mais bien le texte qui revient – sous une nouvelle forme. Altéré, évidé, réagencé, mis à nu, il se manifeste sous un jour nouveau, il se donne autrement.

Toute mention du tournage avec Duch disparaît. Alors que celui-ci scandait et structurait L’Élimination, laissant le récit intime émerger dans ses intermittences, il se trouve gommé dans L’Image manquante. Le récit à la première personne dont il avait favorisé l’émergence gagne son autonomie, se déploie sans lui. Cette fois, le texte s’ouvre sur cette affirmation : « Au milieu de la vie, l’enfance revient. ». Ainsi, le texte ne doit plus rien à Duch. Il ne provient plus de la rencontre avec le criminel, mais du rythme interne du sujet, de sa vie propre. À l’approche de la cinquantaine, Rithy Panh se souvient de son enfance, et raconte. C’est bien à une nouvelle émergence du texte que l’on assiste, une nouvelle naissance.

Aussi l’enjeu ne sera pas, cette fois, de cheminer vers la parole. Ce cheminement a été accompli, un texte en a résulté. Dans sa remise en jeu cinématographique, un déplacement s’opère. L’espace habitable offert par le texte, cette fois, ce n’est pas tant la vacance d’une première personne qu’un espace de résonance.

Un lieu où faire résonner l’inaudible de la parole

Pour comprendre ce qui se joue dans la reprise singulière dont le texte de L’Élimination fait l’objet, sans doute faut-il citer cette anecdote rapportée par Rithy Panh :

Je me souviens que mon père aimait réciter des poèmes dans son français impeccable. Combien de fois l’ai-je entendu murmurer « Cheveux noirs, cheveux noirs, caressés par les vagues »… C’est le début d’un poème de Prévert. Une ritournelle que je ne comprenais pas. J’en ai trouvé le texte, il y a quelques années, puis je l’ai perdu, comme s’il ne devait rester que cette chevelure sans corps, ces mots orphelins 42

Texte-fantôme, le poème de Prévert est à la fois ce qui s’efface et ce qui fait retour. Ces deux vers au rythme lancinant sont cités à plusieurs reprises, dans L’Élimination et dans L’Image manquante. Ils y résonnent. Ils sont le signe d’une permanence des mots, mais d’une permanence qui ne laisse subsister que des bribes, des fragments, des traces. Et dans ce qui demeure et continue de frapper l’oreille, ce qui manque est sensible.

Ce qu’exerce le poème de Prévert, c’est une hantise. Et il me semble que dans L’Image manquante, c’est également sur le mode de la hantise que le texte se manifeste. Des bribes, des mots, des scènes de L’Élimination subsistent dans le film, insistants. Il y a les scènes inévitables de la mort du père, de la nièce, de la mère. Il y a la scène qui fait comprendre à Rithy Panh jusqu’où la vie imposée par les Khmers rouges dégrade les êtres humains : celle où un enfant dénonce sa mère. Il y a, évoquées conjointement et en quelques mots, deux scènes d’horreur : des vers dans la plaie d’un blessé, l’agonie d’une femme enceinte. Toutes ces scènes, dans L’Image manquante, sont dites plus brièvement que dans L’Élimination, portées par des énoncés denses et elliptiques.

Parfois c’est une figure qui revient : celle, presque mythologique, du gardien au berger allemand. Parfois c’est une expression : ainsi celle des corps qui tapent quand on les jette dans les fosses. Dans l’Élimination, Rithy Panh dit utiliser ce mot à dessein, parce qu’il n’en trouve aucun qui rende ce « son très particulier 43 » par lequel il est « hanté 44 », qu’il entend encore dans ses cauchemars. Dans L’Image manquante, le commentaire reprend ce mot. La voix du récitant énonce : « Il y a des sons creux, des os qui tapent ».

D’autres mots et expressions font l’objet de reprises. Enterrement de(s) mots, marcher contre l’épine, douceur, ritournelle… Ce sont des récurrences discrètes, des résurgences ténues, en apparence insignifiantes. Elles disent pourtant la permanence des mots, qui tiennent bon, qui tiennent ferme et nous tiennent. L’altération de la langue opérée par les Khmers rouges est un fait souvent mentionnée par Rithy Panh comme un instrument de déshumanisation et de violence. Le commentaire de L’Image manquante la résume en une phrase : « Les mots sont transformés. » Dans le travail de Rithy Panh, au contraire, les mots ne sont pas transformés. Ils demeurent. Persistent d’œuvre en œuvre, de reprise en reprise.

 Au fond, ce rapport au texte dit quelque chose d’un rapport à la disparition. Il s’agit d’opposer à l’anéantissement voulu par les Khmers rouges une autre forme de l’absence : la permanence du souvenir et la permanence des mots permettent que subsiste, malgré tout, quelque chose des disparus. À l’effacement total, L’Image manquante oppose une spectralité et une hantise.

Mais autre chose retient mon attention dans l’évocation par Rithy Panh du poème de Prévert : le fait qu’il s’agissait d’un texte pour lui inintelligible. Ce texte dont demeure un écho sonore véhiculait quelque chose d’inaccessible – il ne parlait pas encore le français. Or je crois qu’une des vocations de L’Image manquante est, précisément, de faire transiter l’inintelligible d’un texte.

La parole, dans L’Élimination, est portée jusqu’au point où on ne peut plus l’entendre. Jusqu’à ce que les mots perdent toute réalité, et ne transmettent plus au lecteur leur sens – le point de rupture où aucune transmission n’est possible. Ce sont les évocations de la cruauté, dans ses expressions les plus insupportables. Rithy Panh dit lui-même cette impossibilité d’accéder au sens de certaines phrases trouvées dans les archives de S21 :

Je recopie deux phrases. J’essaie d’imaginer, calmement, simplement, ce que signifie chaque mot. Ce sont des phrases humaines. Ce sont des actions menées par des humains. Sur des humains. Mais il n’y a plus d’humanité.

Disséquer une femme vivante.
Prélever tout le sang d’une femme.

Je les recopie encore. Quels cris pousse un humain quand on lui fend le ventre ? Quand on découpe son foie ? Quand on retire ses viscères ? Quels cris pousse un humain quand il comprend qu’on lui prélève tout son sang et qu’il ne s’en relèvera plus ? Ces expérimentations ont été menées à S21 45.

Dans L’Image manquante, les scènes les plus violentes de L’Élimination sont absentes. Est-ce parce que Duch est laissé en dehors du récit, parce que le rappel de la cruauté n’est utile que quand il s’agit de faire reconnaître leur responsabilité aux bourreaux ? Sans doute. Mais il n’est cependant pas question de masquer ou de taire la violence subie dans ces années.

Ces scènes manquantes, intolérables, sont présentes en creux dans le film. Le texte les fait résonner, porteur qu’il est de ses lacunes. Le lecteur de L’Élimination entendra cet écho. Les autres spectateurs pressentiront seulement que ce texte elliptique et comme ajouré ne leur délivre pas tout.

Certains épisodes sont simplement laissés de côté. L’homme dévoré par les fourmis, le frère et la sœur contraints à des rapports sexuels devant témoins, ne trouvent ici pas leur place – mais puisque le texte hante le film, ils ne sont pas tout à fait absents. D’autres faits, en revanche, résonnent plus directement. Cette femme disséquée vivante, justement, dont Rithy Panh ne peut imaginer le supplice, et encore moins le transmettre. Dans L’Image manquante, les expérimentations sur les humains sont évoquées, mais sans plus de détail. À l’image, deux plans successifs : une souris vivante sur laquelle on entreprend des expériences, et, dans un laboratoire, un lapin éventré, aux viscères exposées. Ces plans sont en eux-mêmes éprouvants à regarder. Ils sont la limite de violence que l’on peut montrer en images. Y superposer l’évocation indirecte d’une expérimentation précise menée à S21, non sur des animaux, mais sur une femme, c’est évoquer l’horreur de la seule façon possible, qui ne la rend ni banale, ni inaudible. C’est en produire l’écho. Puisqu’elle est indicible, et immontrable.

Un tel écho peut aussi se produire sans image pour le soutenir. Ainsi, quand le commentaire du film évoque la boîte en fer-blanc qui sert à mesurer la ration de riz. Bien sûr, rien ne semble manquer dans cette scène, qui évoque la famine, en donne la mesure. Cependant, ce qui succède immédiatement à cette évocation, dans L’Élimination, c’est la mort d’un enfant dont l’estomac éclate d’avoir trop mangé, un jour où le riz s’est trouvé plus abondant que de coutume. Rien n’évoque cette mort dans L’Image manquante. Mais d’entendre mentionner cette boîte en fer-blanc Nestlé, elle me revient, et me serre les mâchoires.

Ce qui manque n’est pas dissout. C’est une blessure.

Accueillir les âmes errantes

Résonance de ce qui est manquant. Parce que le mode de présence du texte est la spectralité, le film se donne comme un espace propre à être hanté. Plans ouverts au texte, disponibles, traversés. Leur forme si particulière s’y prête : ces scènes muettes, immobiles, dans lesquelles la caméra se déplace lentement parmi les figurines d’argile. Espaces où la voix résonne. Espaces d’accueil.

Et au-delà de la voix et du texte qu’elle porte, ce sont tous les spectres qui sont accueillis. C’est à cet accueil que vise L’Image manquante – film et texte publié. On pourrait se demander pourquoi reprendre un récit qui avait déjà été fait : c’est que cette fois, il ne s’agit plus soi-même de trouver sa place dans le récit, mais d’en faire un lieu pour les disparus.

Exit le bourreau, donc – ce film n’est pas pour lui. Quant à Rithy Panh, il ne disparaît pas. Il maintient la première personne, évoque ses proches et ses souvenirs. Mais sa présence, cependant, se fait plus discrète. Tout ce qui fait référence à sa propre expérience est passé sous silence : ses actes de résistance 46, tout ce qui relève de sa survie 47. La dimension chronologique qui présidait au récit de L’Élimination est elle aussi minorée, la précision biographique s’estompe. Dans le film, les scènes et les tableaux qui se succèdent semblent relativement autonomes et pourraient être indépendants les uns des autres – des fragments dépeignant le quotidien de la déportation. Quant aux images d’archives, relativement abondantes dans le film, elles contextualisent moins qu’elles ne produisent l’impression d’une répétition interminable, d’un cycle sans fin. La chute des Khmers rouges n’est quant à elle pas racontée, le film ne donne jamais véritablement l’impression de quitter cette époque.

Le récit chronologique permettait de faire des souvenirs épars de Rithy Panh une histoire dont il pouvait être le sujet. Mais ici, l’enjeu est de faire du film un espace disponible aux spectres. Les âmes des disparus sont errantes. C’est un constat douloureux, qui est fait déjà dans L’Élimination :

Chaque année, lors de la fête des morts, les Khmers de tous âges rentrent chez eux : ils prient et apportent des offrandes dans les pagodes. Aujourd’hui la mélancolie me gagne. Je ne dors plus. Je ne suis pas religieux, mais l’idée que les miens sont sans sépulture m’est pénible. Mon frère a dressé une stupa dans une pagode de Phnom Penh, mais je n’y vais pas. Comment dire : les morts ne sont pas chez eux.

Dans L’Image manquante, ce n’est plus seulement de ses proches qu’il est question :

Il y a toujours les âmes, qui errent, se cherchent un lieu, une pensée douce et noble. Beaucoup ont résisté. Beaucoup. En silence. D’un mot. D’un sourire.

Il s’agit toujours d’évoquer ceux qui ont résisté. Mais cette fois, il s’agit de faire place à toutes les âmes, connues et inconnues. Faire, une fois encore, le récit des actes de courage de quelques uns, mais pour mieux évoquer ceux qu’il ignore, ceux dont il n’a pas été témoin – et offrir un lieu, « une pensée douce et noble » qui soit un havre pour les âmes errantes.

C’est pourquoi les noms disparaissent. Les noms des jeunes garçons qui travaillaient avec lui ou faisaient partie de son unité. Le nom du père, qui n’est plus cité – les parents deviennent d’ailleurs le père et la mère, la nièce devient la petite fille. Et les noms des prisonniers de S21 disparaissent également, quand il affirmait avec force dans L’Élimination :

Trente ans après, le message nous parvient. Il est souvent combattif. Parfois désespéré, mais pas toujours. À nous de guetter cette parole, ce murmure, à nous d’évoquer Taing Si Leang, j’écris ici son nom, afin qu’il demeure en nous, et son sourire 48.

Même Bophana n’est pas nommée, elle qui est une présence récurrente dans les films de Rithy Panh. Son visage apparaît, mais elle devient « une jeune inconnue qui défie l’appareil photo ». Un sursaut toutefois : dans le texte édité de L’Image manquante, faute de photographie, son nom réapparaît.

Il ne s’agit pas d’effacer les individus et leur singularité. Mais ce récit-là a déjà été fait. Ces morts-là ont eu la place qu’ils réclamaient. À présent, reste à accueillir tous les autres, anonymes, disparus sans laisser de traces – ni archives de prison, ni survivant qui ait eu soin de raconter leur sursaut de dignité.

Alors il faut ensemencer le texte de vide, de manque et d’absence. En faire un texte hanté, ouvert aux spectres. Puis, ultime étape, en le publiant sous une forme autonome, faire disparaître aussi les images – photographies des visages de S21, statuettes qui isolaient quelques figures. Si le texte publié est assez peu remanié, il introduit de l’espace, du blanc, du vide : le texte se dispose sur la page sous forme de vers, et ne la remplit pas.

À cette désertion de l’espace s’ajoute une disparition : celle de la voix du récitant, de sa sonorité et de sa texture. Dans la version filmée de l’Image manquante, le texte prend une forme sonore, lancinante, rythmique. La voix qui l’énonce n’est pas celle de Rithy Panh en personne, mais celle de Randal Douc, un autre Cambodgien émigré en France, et n’ayant pas vécu personnellement la déportation. Confié à la voix d’un autre, le texte s’ouvre à l’altérité, qui le traverse. Il se détache progressivement de l’expérience intime et accomplit un cheminement de soi vers autrui. Or, cette voix si présente au spectateur de L’Image manquante, dans une ultime étape, disparaît à son tour. Dans le texte imprimé ne subsiste que son écho et son souvenir – tout comme subsiste le rythme mélancolique des vers de Prévert.

Cette disparition, sensible au spectateur, en évoque une autre. La voix manquante appelle les morts qui manquent. Appelle les spectres. La vacance manifeste qui s’ouvre au sein du film, que creuse encore le texte imprimé, se fait possibilité d’accueil : espace offert aux morts, afin qu’ils n’aient plus à « se cherche[r] un lieu ».


  1. Outre S21, La Machine de mort khmère rouge réalisé en 2002, on peut citer un film de 1996 : Bophana, Une Tragédie cambodgienne.
  2. Panh Rithy, Entretien avec Julie Clarini, « Chaque mot amène une image », Le Monde, 12 janvier 2012
  3. Panh Rithy, Entretien avec Arnaud Vaulerin, « Je pensais que le bourreau dirait la vérité », Libération, 7 janvier 2012.
  4. Le gouvernement khmer rouge a organisé la déportation massive des populations citadines vers les campagnes, où elles ont dû s’acquitter des travaux agricoles dans des conditions très rudes et pratiquement sans nourriture. La famine, les épreuves physiques, l’absence de soins et les exécutions ont porté à plus d’un million le nombre de victimes.
  5. Panh Rithy, La Terre des âmes errantes, INA – La Sept Arte, France, 1999.
  6. Panh Rithy, Les Artistes du théâtre brûlé, Catherine Dussart Production – INA – Arte France, France, Cambodge, 2005.
  7. Panh Rithy, Le Papier ne peut pas envelopper la braise, Catherine Dussart Production – INA – AarunBopha, France, Cambodge, 2006.
  8. Panh Rithy, Bophana, Une Tragédie cambodgienne, Catherine Dussart Production – INA – France 3, France, 1996.
  9. Panh Rithy, S21, La Machine de mort khmère rouge, INA – Arte France, France, 2002
  10. Panh Rithy et Bataille Christophe, L’Élimination, Librairie Générale Française, Coll. Le livre de poche, Paris, 2018 [2011].
  11. Panh Rithy, Duch, Le Maître des Forges de l’Enfer, Catherine Dussart Production – Bophana Production – INA – France Télévisions, Cambodge, France, 2011.
  12. Panh Rithy, L’Image manquante, Catherine Dussart Production – Bophana Production – Arte France, Cambodge, France, 2013.
  13. Panh Rithy et Bataille Christophe, L’Élimination, op. cit., p. 138.
  14. Panh Rithy et Bataille Christophe, L’Image manquante, Grasset, Paris, 2013, p.7.
  15. Rithy Panh insiste régulièrement sur le vocable « kamtech » employé par les Khmers rouges, qui signifie détruire, réduire en poussière, anéantir.
  16. Rithy Panh remarque qu’il était nécessaire selon Duch que la victime se mette à croire à son propre aveu, et commente : « Cet homme vit dans un monde où la confession qu’il acceptait devenait la vérité – au prix de quels supplices ». Panh Rithy et Bataille Christophe, L’Élimination, op. cit., p. 238.
  17. Ibid., p. 242.
  18. Ibid., p. 225.
  19. Panh Rithy, Entretien avec Arnaud Vaulerin, op. cit.
  20. Panh Rithy et Bataille Christophe, L’Élimination, op. cit., p. 67.
  21. Ibid., p. 67.
  22. Ibid., p. 73.
  23. Ibid., p. 102.
  24. Ibid., p. 70.
  25. Ibid., p. 14.
  26. Ibid., p. 226.
  27. Benveniste Émile, « De la subjectivité dans le langage » [1958], in Problèmes de linguistique générale I, pp. 258-266, Gallimard, coll. Tel, Paris, 1966, pp. 259-260.
  28. Benveniste Émile, « La nature des pronoms » [1956], in Problèmes de linguistique générale I, pp. 251-257, Gallimard, coll. Tel, Paris, 1966, p. 254.
  29. Benveniste Émile, « De la subjectivité dans le langage », p. 263.
  30. Panh Rithy et Bataille Christophe, op. cit., p.26.
  31. Ibid., p. 26.
  32. Ibid., p. 24.
  33. Ibid., p. 212.
  34. Ibid., p. 192.
  35. Bataille Christophe, Entretien avec François Ekchajzer, « “Rithy Panh vit dans la mort, c’est un rescapé”, Christophe Bataille, écrivain », Télérama, 9 octobre 2013.
  36. Panh Rithy et Bataille Christophe, L’Élimination, op. cit., p. 192.
  37. Ibid., p. 12.
  38. Ibid., p. 137.
  39. Ibid., p. 213.
  40. Ibid., p. 27.
  41. Ibid., p. 27.
  42. Ibid., pp. 65-66.
  43. Ibid., p. 191.
  44. Ibid., p. 190.
  45. Ibid., p. 107.
  46. Le slogan calligraphié au tableau, le port d’une chemise blanche quand la défaite des Khmers rouges semble imminente.
  47. Comment il manque de se faire mordre par un cobra, comment il est sauvé de la dysenterie, comment il sort de la zone des morts où on l’avait relégué à l’hôpital.
  48. Ibid., p. 86.

  • Duch, le maître des forges de l’enfer
    2011 | Cambodge, France | 1h43 | Vidéo
    Réalisation : 2011
    Production : Catherine Dussart Production (CDP), Bophana Production, INA, France Télévisions
  • L’Image manquante
    2013 | Cambodge, France | 1h35 | Vidéo
    Réalisation : Rithy Panh
    Production : Catherine Dussart Production, Bophana Production, Arte France

Publiée dans La Revue Documentaires n°31 – Films, textes, textures (page 75, Juillet 2021)
Disponible sur Cairn.info (https://doi.org/10.3917/docu.031.0075, accès libre)