Pierre qui manque

Michelle Gales

Comme il y a des trous de mémoire, on est tenu de penser des trous d’histoire : périodes, processus, événements desquels les traces ne manquent pas toujours…

Comment le cinéma contribue-t-il à un travail d’élaboration tel que ce trou devienne pensable ? Comment penser la présence de l’invisible et de l’indicible ?

Ce sont des mots de Pierre dans le numéro qu’il a coordonné et intitulé, La mémoire interdite.

Et nous voilà littéralement aujourd’hui devant un grand trou, un grand trou dans la vie. Les traces manquantes de notre vie comme celles de notre ami Pierre dont nous ne connaissons chacun que quelques aspects, quelques périodes. Nous ne pouvons connaître qu’imparfaitement ceux que nous aimons…

Parti pour la philosophie et l’enseignement, mordu par le cinéma, Pierre a détourné le cinéma comme un outil de réflexion sur toutes les questions de la vie.

Pierre était important dans ma vie comme il a été pour beaucoup d’entre nous. Il était l’ami rare, intelligent, érudit, mais jamais intimidant. Devant la tristesse ou la colère, il avait toujours les mots pour aider à les dépasser.

Devant l’enthousiasme ou le doute, il encourageait à poursuivre mais aussi toujours à chercher, à rêver, à poser des questions en essayant de rester intègre et généreux comme il était.

Il nous manquera, mais, il nous a tant donné aussi qu’il nous restera en souvenir : son intelligence, son humour, son humanité et sa magnanimité.

In memoriam, Pierre Baudry
Publiée dans La Revue Documentaires n°19 – Palestine/Israël. Territoires cinématographiques (page 165, Juin 2005)